La Résistance dans le Puy-de-Dôme

« Les combats de la Résistance dans le Puy-de-Dôme, entre faits d’armes et actions quotidiennes »

I- Pourquoi cette exposition ?

Histoire – Mémoire – citoyenneté et territoire” est un projet ambitieux de l‘association qui vise à unir plusieurs actions dans une démarche cohérente de transmission et de valorisation d’un patrimoine local multi-dimensionnel dont celui de la Mémoire combattante et de la citoyenneté et de sensibiliser tous les publics mais prioritairement les jeunes.

Une des actions porte sur la création d’une exposition mobile sur la thématique générique de « la  Résistance dans le Puy-de-Dôme ». En effet, Il existe divers documents ou expositions présentant les actions de la Résistance dans le département, mais ce sont dans la majorité des cas, des présentations certes très détaillées et très riches, mais qui n’évoquent qu’une partie du territoire, ou fait référence à un événement, à un thème. Il n’existe pas, à priori, d’exposition unique rappelant la Résistance sur l’ensemble du territoire de notre Puy-de-Dôme.

II- Avec qui concrétiser cette aventure?

Une exposition pour les jeunes et par les jeunes dans le cadre d’un projet collectif, c’est aussi un partenariat qui s’inscrit dans un parcours pédagogique entre l’Université Clermont Auvergne (UCA) et les Boucles de la mémoire. Cette convention signée avec l’UFR « lettres, culture et sciences humaines » et plus particulièrement avec le département « Métiers de la culture » propose aux étudiants de Master 2 de la filière « accompagnement culturel et touristique des territoires » une commande réelle qui les placera en situation professionnelle concrète. Présentons ce groupe de dix étudiants : Elodie Baillet, Victor Canitrot, Théo Eygret, Marine Ferrare, Tifen Labrugère, Camille Montana, Chloé Olivier, Eléa Pellegrino, Lhéna Salord, Vincent Tavares.

Ce projet porte sur le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme. Il poursuit une double finalité, avec deux rendus distincts mais intimement liés par leur thématique et leurs enjeux : d’une part la conception de l’exposition, d’autre part la réalisation d’un épisode d’un web documentaire sur le thème du tourisme mémoriel. L’UCA  intervient en association avec trois autres universités de la région (Lyon, Chambéry et Grenoble) pour la réalisation de quatre épisodes sur le thème du « tourisme de demain en région AURA ». Retrouvez ces webdocumentaire sur : https://www.futourisme.fr/.

III- Comment s’est déroulée cette belle aventure ?

A ce stade cédons la parole aux étudiants qui ont, lors de la soutenance de leur projet collectif, présenté leur démarche, leur appropriation et perception du sujet, leur vision de la thématique.

A- Avec une approche moderne, sensible, inclusive

«  Ce conflit de la Seconde Guerre mondiale et la place d’une Résistance armée composée de maquisards et de personnalités est déjà bien connu de tous. Mais qu’en est-il des combats du quotidien, de ces personnes qui ont lutté d’une façon plus invisible ? ceux qui ont chaque jour participé directement ou indirectement à la résistance grâce à leurs actes de bonté, aux messages délivrés, aux personnes sauvées ? Qu’en est-il même de la vie quotidienne de ces résistants maquisards ? Qu’en est-il des oubliées ? Toutes ces personnes méritent d’intégrer cette résistance. Ce sont elles que nous avons choisies de mettre en avant dans notre exposition.

De plus, le tournant humain qui transforme le tourisme et les mentalités de nos sociétés, nous a conduit à adopter une approche sensible des combats de la résistance. Cette dimension parcourt les émotions, les sens et l’imaginaire. Elle permet notamment aux chercheurs de nombreuses disciplines d’aborder les mêmes sujets sous de nouveaux angles. Et c’est exactement ce que nous avons cherché à faire à travers cette exposition : offrir un regard nouveau sur la Résistance et ses combats, quels qu’ils soient, armés ou non. Ainsi cette approche sensible avait pour but d’appréhender ce sujet dans une dimension plus intimiste, comprendre et mettre en lumière ces personnes qui ont lutté chacune à leur façon, à leur échelle.

Ces recherches ne seraient rien sans la pluralité des souvenirs et des personnes qu’il nous reste à découvrir. Toutes ces personnes constituent un vaste océan de mémoires très variées, individuelles et collectives, personnelles ou publiques qui s’entrelacent pour nous donner une vision de ce qu’a pu être la vie, leur vie. 

Ainsi c’est l’histoire de cette Résistance, de ces personnes que nous cherchons à mettre en lumière à travers cette exposition, une résistance composée à la fois de faits d’armes, de maquisards, mais également d’étudiants, de boulangers et de simples citoyens. Une résistance plurielle qui invite à des mémoires variées.  Nous avons fait le choix d’une approche moderne, sensible et inclusive, aussi bien sur le fond que la forme, d’où l’intitulé de l’exposition « Les combats de la Résistance dans le Puy-de-Dôme, entre faits d’armes et actions quotidiennes ».  Notre exposition n’est pas exhaustive. Ce n’était pas notre but, car présenter une liste exhaustive de toutes les façons de résister serait impossible. Notre but était de montrer des exemples divers pour faire comprendre la pluralité de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale et de la Résistance. De plus, nous pensons que c’est une exposition qui a vocation à évoluer, en ajoutant d’autres panneaux avec d’autres types de Résistance, afin de représenter au mieux la diversité des Combats de la Résistance dans le Puy-de-Dôme ».

Une muséologie moderne  c’est :

• plus d’illustration et moins de texte sur 13 panneaux

• une illustration dessinée contemporaine, avec le trait de Lorette Collard.

Une muséologie sensible c’est :  

• Intégrer le visiteur et le faire interagir avec l’exposition en le faisant passer de spectateur à « spect-acteur » qui ressent, expérimente, et coproduit son expérience de l’exposition ;

• Des objets en parallèle pourront être apporter pour une muséologie participative : radio, valises, etc…

Une muséologie inclusive c’est :

• Un visuel avec des contrastes de couleur fort et une police d’écriture qui est facilement lisible par les personnes malvoyantes et les personnes dyslexiques ;

• Des préconisations pour les exposants pour que l’exposition soit accessible à tous, notamment les personnes en situation de handicap.

B- Avec une approche scientifique

Si les étudiants veulent faire appel à la dimension humaine et sensible du visiteur, ils n’en ont pas moins développé l’approche rigoureuse de l’historien, du chercheur et l’inventivité du créateur.

La constitution d’un comité scientifique :

« Si le but de cette exposition était d’adopter une approche sensible de la mémoire, nous voulions également apporter au public des connaissances spécifiques sur l’histoire de la Résistance dans le Puy-de-Dôme. Afin de s’assurer de la véracité du contenu, nous avons alors formé un comité scientifique de pilotage, composé d’experts. Nous remercions Mme Cécile Dupré directrice du service culture de Clermont Métropole, Mme Christine Perraud responsable du Musée de la résistance à Chamalières, Messieurs Julien Bouchet et Eddy Oziol professeurs d’histoire. Ils nous ont apporté leurs expertises fournit des archives de qualité, prodigué de précieux conseils… […]».

Une approche scientifique nécessite :

Des recherches documentaires :

 « Afin de proposer un discours documenté et visuel, nous avons effectué de nombreuses recherches aux archives départementales. Cela nous a également permis d’ancrer notre exposition dans le réel car plusieurs de ces documents d’archives illustrent les différents panneaux ».

Une enquête auprès de potentiels usagers : 

« En ce qui concerne la forme de l’exposition nous nous sommes appuyés sur les sondages et questionnaires que nous avons réalisés auprès d’élèves en collèges et lycées mais aussi auprès d’étudiants  afin de mieux connaître et comprendre leurs envies et besoins. »

Une quête riche en informations :

« Pour mener ce projet nous avons été amenés à faire des recherches sur le terrain pour trouver des informations ou réaliser des prises de vues. Nous avons par exemple participé à une visite guidée sur la rafle de Billom, visité le musée de la Résistance et de la Déportation à Chamalières, découvert de nombreux sites comme Lespinasse où les traces historiques sont parfois moins visibles, participé aux commémorations du 11 novembre ou  de la rafle de l’Université de Clermont-Ferrand. Enfin, ces enquêtes sur le terrain ont été l’occasion pour nous de rencontrer de nombreuses personnes qui sont venues alimenter la mémoire plurielle. Nous avons également participé à des colloques comme « Mémoire(s), valeurs et transmission» et à cette occasion rencontrer des chercheurs travaillant sur le sujet et des personnes ou associations œuvrant à la préservation et la transmission de mémoires. A l’école d’hiver de Lyon nous avons pu échanger et nous confronter avec d’autres étudiants sur les questions de mémoire ».

IV- Le parti pris créatif

L‘exposition s’articule autour de 13 panneaux où chacun répond à la stratégie choisie par les étudiants. La mémoire s’exprime alors, tout à la fois dans un registre sensible, pédagogique et innovant mais aussi rigoureux, illustré, et accessible à tous pour mieux interpeller le visiteur.

A- Neuf panneaux territorialisés

« Novices dans le monde de la création d’une exposition, tout au long de l’aventure nous avons fait des choix. Tout d’abord nous avons dû choisir la manière d’aborder le sujet. Notre parti pris a été d’associer un lieu à un type de résistance tout en couvrant de manière homogène le territoire du Puy-de-Dôme. Construit de manière à mettre en lien un acte de résistance avec un lieu du Puy-de-Dôme, chaque panneau a pour but de montrer la variété des formes d’engagement de ces hommes et femmes de l’ombre, sans avoir la prétention de l’exhaustivité.

A titre d’exemple, regardons le panneau sur Clermont qui a pour objectif de présenter la thématique de la résistance universitaire à Clermont-Ferrand. C’était en effet pertinent de travailler sur ce sujet puisque la Faculté des Langues Appliquées est aujourd’hui un haut lieu de la mémoire de la Seconde Guerre mondiale. En effet, chaque année, les Universités de Clermont et de Strasbourg commémorent le souvenir des victimes, enseignants, étudiants et personnels administratifs, des événements du 25 novembre 1943. Comme vous le savez, les étudiants et les professeurs de l’Université de Strasbourg ont fui l’Alsace afin de s’installer à Clermont-Ferrand en dépit des nombreuses pressions dont ils faisaient l’objet de la part des autorités allemandes. Se sont développées plusieurs formes de résistance plus ou moins actives, et l’on a donc souhaité en aborder quelques-unes sur ce panneau. Bien sûr, nous ne pouvons pas non plus passer à côté des rafles lancées contre les universitaires. C’était très important pour nous de continuer de faire vivre la mémoire de ceux qui ont transmis leurs connaissances ou étudié à Clermont-Ferrand. »

B- Le cheminement de la pensée entre le panneau introductif et le panneau conclusif

« Dès le premier panneau, nous posons la question “Résister ?” cela pour interroger le visiteur sur qu’est-ce que la résistance ? Nous n’avons pas souhaité y apporter une réponse tirée d’un dictionnaire mais plutôt voulu mettre des mots sur ce qui est pour nous la résistance,  savoir une diversité de profils, d’actions qui se sont engagée dans ce combat face à l’envahisseur nazi. Mais nous souhaitons aussi amener le « spect-acteur » à se poser la même question !

Nous  apportons également dans cette introduction des clés de compréhension afin d’aborder les différents enjeux qui se jouent ensuite  dans nos panneaux tels que la notion de STO (Service de Travail Obligatoire) car beaucoup de nos panneaux sont concernés par ces jeunes personnes qui refusent de se rendre en Allemagne et décident de s’engager dans la résistance en prenant le maquis. »

« Plus qu’une simple conclusion, nous souhaitons que ce panneau  reflète l’esprit de l’exposition pour une ouverture sur la mémoire en amenant le visiteur à se questionner :

–  sur la pluralité des mémoires sur le Puy-de-Dôme mais pas seulement, et ce dans une approche sensible et humaine qui se détachent de toutes catégories et formes sociales.

– sur les mémoires qui peuvent être collectives  mais aussi individuelles et le pousser à réfléchir sur son propre passé, sur sa famille. Cette idée est accentuée par la présence de photographies de personnes inconnues issues des familles de membres du groupe ou de professeurs.

– sur la diversité des sources, des histoires et des mémoires et la nécessité de prendre du recul pour se faire sa propre opinion. »

C- Du fond à la forme

« Pour ce qui est des textes, nous souhaitions une exposition accessible à tous.  Nos choix se sont portés sur une écriture majuscule pour les titres et une typographie facile à lire pour les personnes dyslexiques. Nous avons aussi choisi d’aérer nos panneaux à l’issue des études auprès des jeunes  et rechercher un équilibre entre le contenu historique et  les besoins graphiques. Aussi, l’exposition est illustrée  d’images et de photos issues des archives départementales, mais aussi d’albums de famille. Enfin, pour rendre l’exposition plus sensible, plus expressive nous avons fait appel à Lorette Collard, une jeune illustratrice qui par ses dessins à compléter notre travail de recherche.

Pour les couleurs nous avons choisi :

• du bleu foncé, qui représente la communauté, la confiance et le réseau

• du orange qui représente, l’action, l’initiative mais aussi la prise de risque

• et le beige qui apporte de la douceur dans la dure réalité des faits »

Afin que l’exposition prenne réellement vie sous les yeux des visiteurs, les étudiants ont imaginé de mettre en scène la découverte des panneaux avec une scénographie appropriée composée d’une carte interactive du Puy-de-Dôme, une radio, la mallette du résistant. Des outils pour les enseignants sont également fournis avec l ‘exposition :  une notice explicative pour s’approprier l ‘esprit de l’exposition, des jeux de rôle et autres activités pour une approche ludique du sujet.

V- Laissons le mot de la fin à ce groupe de jeunes passionnés

Leur vision du tourisme, de la mémoire et de l’exposition :

« Dans un monde marqué par la vitesse et le mouvement, on aurait pu développer une approche du tourisme très rapide, très technologique et individualisée. Pourtant, le monde du tourisme voit, depuis quelques années, une demande de lenteur, un ralentissement progressif à la recherche de nouvelles valeurs. Le tourisme mémoriel commence à s’imprégner de ces nouvelles philosophies guidées par un tournant plus humain, plus accessible et surtout plus sensible notamment autour de la question de la mémoire.

Ce champ très complexe de la mémoire commence à s’élargir, et à quitter le prisme de la Seconde Guerre mondiale pour développer des réflexions, des scénographies et des souvenirs en tous genres. Bien que le tourisme mémoriel soit en train de se développer et de s’étendre vers de nouveaux sujets, il n’en reste pas moins marqué par les deux guerres mondiales et par toutes les mémoires qui en découlent. Ces traces du passé façonnent les sociétés, les communautés et les individus, c’est là ou le tourisme mémoriel doit devenir un vecteur de la pluralité des mémoires pour transmettre, apprendre et se souvenir. Qu’il développe une entrée interactive, amusante ou immersive, ce tourisme ne doit pas perdre de vue qu’il touche à des émotions, à des moments bouleversants mais aussi à des souvenirs heureux.

Ainsi, l’exposition « Les combats de la Résistance dans le Puy-de-Dôme, entre faits d’armes et actions quotidiennes » est le témoin de toutes nos recherches et de toutes nos réflexions sur les projections du tourisme mémoriel dans le futur. Nous voulions apporter une vision plus moderne et plus sensible de la question des mémoires pour mettre en avant les souvenirs cachés, parfois oubliés ou non-dits sans pour autant fermer les mémoires à une éventuelle évolution dans le temps. L’histoire et la mémoire touchent l’Homme, ses souvenirs, et ses émotions, alors il était de notre envie et peut être de notre devoir de montrer la pluralité des souvenirs et des histoires de ces résistants méconnus. Nous n’enlevons rien aux grands héros de guerre et de la Résistance, bien au contraire ils font déjà partie de la mémoire nationale, mais il fallait mettre en lumière des personnes normales, qui, au prix de nombreux sacrifices et risques, ont décidé de combattre, à leur manière, l’envahisseur nazi.

Maintenant c’est à nous de laisser une trace de notre passé, à travers un web-documentaire et surtout une exposition qui visent à perpétuer notre vision de la mémoire. Qu’importe d’où l’on vient et peu importe où nous allons, les souvenirs façonnent nos quotidiens, nos personnalités et nos futurs. Alors peut-être que les traces du passé sont les clefs pour comprendre le présent et préparer l’avenir ? Une chose est sûre, comme dit Paul Ricoeur : “ Quand on parle du passé, soit on oublie soit on rabâche” alors à travers ce travail nous vous avons bien rabâché à quel point la mémoire est essentielle à l’Homme et à quel point ses souvenirs sont importants.

Pour clôturer cette présentation, on pourrait ajouter qu’une équipe n’est pas un groupe d’individus qui travaillent côte à côte sur un même dossier. Une équipe est un groupe de personnes qui se font confiance. Pendant toute la durée de notre travail, nous avons croisé des personnes qui nous ont appris, qui nous ont accompagnés, et très souvent qui nous ont inspirés. »

Que rajouter ! si ce n ‘est un grand merci à Elodie, Victor, Théo, Marine, Tifen, Camille, Chloé, Eléa, Lhéna, Vincent pour leur merveilleux travail, mais surtout pour leur enthousiasme et leur générosité. Ils ont mis leur cœur dans cette belle production qui fera, nous n’en doutons pas, le tour du Puy-de-Dôme.

A l’issue de cette année, ils vont prendre leur envol. Nous leur souhaitons bon vent pour cette vie nouvelle qui s’ouvre devant eux. Qu’ils conservent leur enthousiasme et leur passion et ce bel esprit d’équipe.

Nous, nous conserverons l’exposition comme passeur de mémoire.

Les étudiants de M2 accompagnés des porteurs du projet d’exposition sur la résistance dans le Puy-de-Dôme
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