Resistance et résilience

Commémoration des 75 ans de la rafle universitaire

Universités Clermont-Ferrand et Strasbourg

Mémoire, Résistance et tourisme

Christine Lechevallier, Maître de conférences associé de droit public, Université Clermont Auvergne et Didier Masurier, Maître de conférences en sociologie, Université Clermont Auvergne.


Le voyage d’agrément, ou le tourisme, a souvent pour mobile, l’histoire des hommes, des territoires, ou le désir d’en remonter le fil, une généalogie signifiante. Il procède en quelque sorte d’une quête de l’origine des cultures dont les monuments, le patrimoine bâti et matériel constituent notamment des témoignages remarquables et appropriés. Les lieux, les vestiges et les marques de confrontations, de conflits guerriers constituent également les jalons d’une histoire et d’une identité collective, citoyenne que les épreuves et la souffrance ont forgées.


Nous connaissons tous, des hauts lieux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale qui furent le théâtre d’événements dramatiques, à l’instar d’Hiroshima, d’Auschwitz ou encore du plateau des Glières. Ils incarnent aujourd’hui la souffrance, l’horreur, mais aussi la résistance farouche d’une population. Sur les plages de Normandie résonne encore le souvenir du débarquement et ses bunkers. Ses trous d’obus inscrivent dans le paysage la marque des combats féroces qui se sont déroulés entre les forces allemandes et les alliés. Ces sites attirent chaque année des milliers de visiteurs et pour chacun une bonne raison de venir ou revenir sur ces lieux d’histoire, de souvenir et d’émotion.


L’Auvergne, non plus, n’est pas restée à l’écart de l’Histoire et de cette force de résistance. Aujourd’hui, le Mont-Mouchet, un des cinq grands maquis de France, qui n’est certes pas le plus connu comme le rappelait le Général de Gaulle dans son allocution du 5 juin 1959 (« il s’est passé ici, un épisode trop méconnu, mais très héroïque de la résistance française »), est un des symboles de la résistance auvergnate, valorisée par un mémorial et un musée. Il n’est pas le seul : de nombreux musées, de nombreuses stèles égrainent au hasard des communes le souvenir d’un combat, d’une fusillade, toujours le souvenir d’un acte héroïque.


Dans le cadre d’un partenariat entre l’Université Clermont Auvergne (UCA) et des institutions publiques ou privées, des étudiants du master 1 Direction de projets ou établissements culturels, parcours Accompagnement culturel et touristique des territoires (ACTT), se voient chaque année, confier une réflexion professionnalisante sous la forme d’un projet collectif qui s’inscrit dans une démarche de valorisation culturelle et touristique. En 2017-2018, les étudiants Florence Debas, Léna Huvé, Lucas Marais, Simon Pezaire et Rachel Rigaud ont réalisé un projet collectif dans ce cadre sur le thème : « Lieux de mémoire et attractions touristiques de l’agglomération clermontoise et du pays d’Issoire ». L’Université a d’ailleurs concrétisé un partenariat avec l’Association des anciens militaires retraités, conjoints, sympathisants du Puy-de-Dôme (AMRC 63).

Cette association présente des activités multiples, dont la participation aux diverses cérémonies commémoratives par la mobilisation de porte-drapeaux. Elle réalise ses actions dans une démarche citoyenne et mémorielle. C’est pourquoi sa commande, mêlant à la fois histoire et tourisme, avait pour objectif de valoriser des lieux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale en les inscrivant dans une synergie en lien avec les sites touristiques du département. Pour l’association, il est important de transmettre la mémoire aux plus jeunes mais aussi d’inscrire ses actions dans une démarche globale dynamique, attractive et pédagogique, afin de sensibiliser les nouvelles générations. Il s’agit de mêler tout à la fois culture, tourisme, environnement et mémoire. Le projet spécifique construit en partenariat avec l’Université Clermont Auvergne mêle justement histoire et tourisme. Il a pour objectif de valoriser les lieux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale dans le Puy-de-Dôme et de les mettre en lien avec les lieux touristiques déjà connus du département.


Cinq étudiants ont travaillé à cette commande mémorielle pendant trois mois. Il nous appartient de vous présenter ce travail en présentant d’une part le contexte conceptuel (I) et, d’autre part, les actions de valorisation du patrimoine touristique et mémorielle proposées, en particulier pour le site de Clermont-Ferrand (II).


I. Une approche intégrée : tourisme et mémoire


Les témoins directs se font désormais de plus en plus rares, toutefois, il est essentiel de transmettre aux jeunes générations, la mémoire des événements historiques. Cependant ce devoir de mémoire a évolué durant les cinquante dernières années. Il s’est adapté aux évolutions sociétales avec notamment le développement de la communication, des échanges culturels et touristiques et des nouvelles technologies.


A. Du devoir de mémoire au tourisme de mémoire


1) La visite des lieux de mémoire peut porter sur des sites témoins d’événements, des sites commémoratifs, des sites informatifs et pédagogiques… qui répondent à des usages différents. Ce sont des lieux de pèlerinage pour les familles de victimes. C’est aussi un besoin collectif de commémorer ses morts selon un rituel immuable, pour se sentir unis dans un passé commun. Si cette fonction commémorative fonde les lieux de mémoire, elle prend aujourd’hui une dimension nouvelle à la fois pédagogique pour comprendre l’histoire et identitaire : elle offre des repères à une société du mouvement et mondialisée.


L’histoire a façonné le territoire français en le jalonnant de vestiges autour desquels s’est développé un tourisme de mémoire. Ce tourisme connaît un nombre croissant de participants et constitue un enjeu pour l’État. Il s’agit de mettre en avant le patrimoine historique d’un lieu marqué par un événement ponctuel, bien souvent douloureux. Il peut s’agir du lieu d’une bataille ou d’un massacre. Le tourisme ainsi concerné va se développer par la visite de sites historiques, de cimetières militaires, de monuments anciens, mais aussi par des édifices commémoratifs bâtis après les événements comme les musées ou les mémoriaux. Chaque année, ces sites attirent plusieurs millions de visiteurs venus pour près de la moitié de pays étrangers. En 2016, environ 12 millions de visites ont été effectuées sur des sites mémoriels1.


Depuis 2014, de nombreux événements commémoratifs tels que le 70ème anniversaire du débarquement de Normandie et principalement le cycle dédié au Centenaire de la Première Guerre mondiale ont permis de mettre en lumière le patrimoine mémoriel français. Ils ont contribué ainsi à une hausse de la fréquentation des lieux de mémoire de plus de 25 % par rapport aux années précédentes et au développement de l’offre touristique et mémorielle sur l’ensemble du territoire2. Pour développer une véritable stratégie nationale du tourisme de mémoire, une convention relative au tourisme de mémoire a été signée, le 29 mai 2011. Elle vise à promouvoir et valoriser les sites, améliorer l’accueil des visiteurs en développant une marque de qualité, soutenir les innovations technologiques autour d’appels à projets, favoriser la mise en réseaux des sites en créant des circuits thématiques et à accroître l’attractivité de cette filière. Dans le cadre de la déclinaison de cette convention, deux contrats de destination « Centenaire de la Grande Guerre » et « Tourisme de mémoire en Normandie » ont été signés, fédérant acteurs publics et privés autour d’une thématique clairement identifiée. Le but est de construire une offre touristique cohérente et lisible, respectueuse de la transmission du passé et des fondements de la République.


2) Le tourisme de mémoire se fonde sur des sites emblématiques de l’histoire notamment celle des grands conflits. C’est « une démarche incitant le public à explorer des éléments du patrimoine mis en valeur pour y puiser l’enrichissement civique et culturel que procure la référence au passé »3.

Il joue aussi un rôle important dans le développement des territoires. Il permet au public de mieux comprendre le passé tout en participant à son enrichissement civique et culturel. Il contribue également à la vitalité économique et culturelle des territoires. Le ministère des Armées assure la gestion et la valorisation de nombreux sites. Il est également porteur de la politique de mémoire pour faire de ces lieux des lieux de souvenir et de transmissions mais aussi des lieux d’échanges de réflexion sur l’histoire. Depuis 2004, le site internet « Chemins de mémoire » invite le public à partir à la découverte de ce patrimoine d’une très grande diversité, au moyen d’une carte interactive et de fiches historiques détaillées4.

La secrétaire d’État auprès de la ministre de la Défense, Geneviève Darrieussecq, soulignait en 2016 l’importance prise par le tourisme de mémoire ces dernières années en France. Elle l’expliquait par « le goût des Français pour la généalogie, leur appétence au travail de mémoire, la volonté de retrouver leurs racines »5. Mais cet engouement pour le passé a aussi été conforté par les efforts de modernisation de plusieurs sites de mémoire, proposant des approches plus interactives, avec des scénographies ludiques, des animations 3D, des bornes tactiles, des parcours vidéo-guidés. Ainsi dans la Somme, on peut visiter de musées mais aussi effectuer une randonnée à cheval ou découvrir à vélo les monuments dédiés à la Grande Guerre le long d’un parcours reliant Arras à Amiens.


B. De la transmission du passé à la découverte d’un territoire


1) Le vocable « lieu de mémoire » est relativement récent. On le doit à l’historien Pierre Nora6. Un tel lieu peut être aussi bien un site matériel qu’un objet social construit. Ainsi, il peut s’agir d’un monument, d’un personnage, d’un musée, d’archives, tout autant que d’un symbole ou d’une devise. Un lieu de mémoire est donc porteur d’une histoire forte liée à un territoire. Il s’inscrit également et à part entière dans le patrimoine culturel et naturel. Il existe différents types de lieux de mémoires traditionnels comme les plaques commémoratives, les mémoriaux ou les monuments aux morts7. Alors qu’ils ont une histoire poignante à raconter, la population passe désormais souvent devant eux sans vraiment leur prêter une réelle attention. S’ils sont la mémoire des guerres, ces monuments aux morts sont de nature différente et ils contiennent chacun des éléments symboliques propres à raviver le sentiment de citoyenneté.


Le tourisme de mémoire, quant à lui, n’est pas un phénomène nouveau. Il a cependant du mal à être reconnu. Il faut dire qu’il est porteur de contradictions : comment relier la notion de tourisme associé aux loisirs à celle de mémoire associée au recueillement, au souvenir ? Et quel équilibre trouver entre commerce et respect ? La France dispose de nombreux sites de mémoire liés aux conflits contemporains qui viennent compléter l’offre touristique traditionnelle. Il porte un enjeu civique et pédagogique car il favorise la transmission du patrimoine mémoriel aux jeunes générations alors même que les témoins directs se font de plus en plus rares. Il contribue aussi au développement de la conscience citoyenne et à l’enrichissement personnel sur l’histoire de son pays. Il véhicule également un enjeu culturel et touristique. Il permet un développement global du territoire et constitue un levier d’attractivité et de vitalité économique non négligeable. Ainsi, le tourisme de mémoire ne doit pas être traité à part mais au contraire il doit être valorisé dans une approche touristique globale et intégrée.


2) C’est dans cette approche relevant à la fois du souvenir identitaire et de pédagogie que l’AMRC 63 souhaite faire découvrir les sites mémoriels et historiques du Puy-de-Dôme. Le territoire auvergnat rassemble à la fois une multitude de lieux marqués par les guerres et un environnement touristique de qualité. Ce département au 1er rang des départements auvergnats et au 23ème rang des départements les plus visités de France avec un chiffre d’affaires de 671 millions d’euros en 20148.

Le nombre de ces sites étant très important, très vite il est apparu indispensable aux étudiants de réduire leurs ambitions, ramenant la réflexion à la Seconde Guerre mondiale d’une part et aux territoires de Clermont-Ferrand et d’Issoire d’autre part. De même, il a fallu se rendre à l’évidence, certains lieux ne présentaient pas de caractéristiques additionnelles permettant de les rendre plus attractifs en les reliant aux flux touristiques existants. Aussi, il a semblé pertinent d’optimiser les dimensions touristiques et mémorielles afin de les rendre les plus complémentaires possibles.


Ce processus de sélection avait pour but de mettre en évidence les forces et les faiblesses, les risques et les potentialités de chaque territoire inventorié. Ce n’est qu’en sélectionnant des points d’attractivité précis que les autres sites pourront dans un deuxième temps être touchés par le rayonnement de ces sites initiaux et attirer à leur tour de nouveaux publics. L’objectif étant de lier mémoire et tourisme, les étudiants ont eu à répertorier, sur les territoires retenus, l’ensemble des lieux de mémoire de la Seconde Guerre mondiale qu’il s’agisse de monuments aux morts, de stèles, de lieux de massacre, de torture, de fusillade ou des maquis pour poursuivre par le recensement des potentialités touristiques en terme d’offres patrimoniales bâtis et naturels, de services ou de mobilité avant de croiser les critères.

Il est important, à ce stade, de rappeler que les choix qui ont été faits, n’avaient pas pour but de hiérarchiser les lieux de mémoire, ils sont tous aussi importants et égaux dans la dimension mémorielle, mais plutôt d’avoir une approche pragmatique et opérationnelle afin de produire dans le laps de temps accordé, un travail sérieux et nourri pouvant conduire à des propositions et actions de valorisations du territoire du grand Clermont et du Pays d’Issoire.

II. Des actions de valorisation ponctuelles des patrimoines touristiques et mémoriels réunies en un seul parcours.


De nombreux lieux de mémoire et touristiques, disséminés sur les périmètres de recherche précités, ont été recensés. Cependant, il est apparu nécessaire dans un souci de cohérence, de lier ces sites entre eux grâce à un fil conducteur emblématique et identitaire pour la région. La randonnée, qui peut être conçue tant dans des cadres naturels qu’urbains fut ainsi privilégiée pour partir à la découverte de l’histoire auvergnate et clermontoise.


A. Des éléments de réflexion en faveur d’une route identitaire


1) Clermont-Ferrand et plus généralement le territoire « du grand Clermont » participent au rayonnement touristique et culturel du département, . Ils recèlent parmi les sites les plus importants à l’image du puy de dôme l’écriture est différente pour le département et le volcan ; s’agit-il ici du département ou du volcan ? Recelant depuis son classement au patrimoine mondial de l’ UNESCO, les emblématiques volcans de la chaîne des puys que sillonnent de nombreux chemins de randonnées et des nombreux chemins de randonnées qui sillonnent la chaîne des puys. L’agglomération clermontoise arrive en tête de la fréquentation touristique. Elle propose une offre variée entre nature, culture et loisirs, pour une clientèle majoritairement française hébergée dans les 1 500 établissements pour une capacité d’accueil de près de 23 300 personnes. Le pays d’Issoire dispose lui aussi d’une offre d’hébergement relativement importante et variée avec une prédominance pour les locations de vacances. Il bénéficie d’un patrimoine culturel riche, reconnu par le label « pays d’histoire », et d’un patrimoine naturel tout aussi attractif propice au développement de circuits de randonnées pédestres, cyclistes ou motorisées.

Afin de valoriser les différents sites sélectionnés, les étudiants ont opté pour la mise en place de circuits de randonnées ou ils ont fait le choix de s’appuyer sur ceux déjà existants. En effet, c’est un outil de mise en valeur facilement mobilisable, qui permet la découverte d’un territoire et constitue une plus-value. Il peut aussi renforcer l’attractivité de celui-ci. La randonnée pédestre met en relation les espaces, les usages et les hommes. C’est un vecteur de rencontres propice aux découvertes. Elle permet de « réapprendre une autre façon de vivre [une autre temporalité et de] découvrir notre histoire sur le grand portulan des chemins » comme le note Jacques Lacarrière9. Le circuit de randonnée est donc un moyen de mettre en exergue des éléments touristiques et patrimoniaux dans le respect des espaces et des usages tout en s’adressant à des publics d’âge et de sensibilité différents. Il permet à chacun de trouver une curiosité en lien avec ses centres d’intérêts ou passion. De plus, le Puy-de-Dôme avec ses 3 700 kms de chemins balisés s’inscrit déjà comme un territoire naturel et de randonnées10.


2) Le projet a consisté à développer une série de circuits sur 10 sites sélectionnés : Clermont-Ferrand, Chamalières, Chateaugay, le puy de dôme/Orcines, Issoire, Chaméane, Saint-Floret, Anzat-le-luguet et Roche-Charles-la-Mayrand. Cette sélection visait à donner la meilleure représentation possible du patrimoine local à la fois urbain et rural.


Par ailleurs, ces sites doivent contribuer à donner une impulsion au tourisme de mémoire, un tourisme quasi inexistant ici contrairement à certains territoires comme la Normandie. La pratique d’un tel tourisme y est très présente et développée. Sans vouloir lui donner la même ampleur et la même prégnance, il apparaît intéressant de s’appuyer sur ces exemples pour des propositions adaptées aux ambitions et aux objectifs locaux qui pourraient prendre une dimension à la fois pédagogique, historique et environnementale.


L’ambition à terme est que les différents circuits forment une route touristique et mémorielle avec pour mission d’inscrire le territoire Puydômois comme un lieu reconnu de la résistance française pendant la Seconde Guerre mondiale. Cette route auvergnate ambitionne de permettre de relier les différents sites physiquement autant que symboliquement. L’objectif serait en ce sens de créer une signalétique identitaire et cohérente facilement identifiable pour tous les publics avec la mise en place d’un logo fonctionnant comme une marque de destination. Cette marque doit être en rapport avec son thème mais aussi son offre et sa fonction. Elle doit correspondre aux valeurs portées tout en restant en relation avec l’image territoriale déjà existante. Elle s’accompagnerait d’un code visuel reconnaissable et commun sur l’ensemble des sites permettant aux acteurs, prestataires et visiteurs de se fédérer et de développer un sentiment d’appartenance. Le public se sentirait alors impliqué, fier d’appartenir à cette communauté mémorielle et deviendrait un ambassadeur de cette page de l’histoire. Cette identité visuelle devrait contribuer à la construction d’un nouvel imaginaire qui s’appuierait sur l’une des perceptions dynamiques que les publics ont de l’Auvergne, à savoir : terre de volcans, de gastronomie, de rugby ou encore de thermalisme. Ces images doivent aussi participer à la mise en lumière de la dimension historique. Et quoi de mieux que de véhiculer cette nouvelle identité en la liant à l’environnement naturel et culturel ?. Les circuits ainsi identifiés feraient office d’émetteur entre la fonction première qu’est la randonnée et la dimension pédagogique développée au travers de jeux de piste ou d’énigmes. Les parcours et la signalétique pourraient également être adaptés aux publics cibles (handicapés, jeunes enfants, adultes…).

Ainsi pourraient être construits différents circuits de randonnées qui trouveraient leur sens dans cette appartenance identitaire à cette route du souvenir liant les sites entre eux. Quant au logo, si les étudiants ont déjà imaginé des visuels, il pourrait être envisagé de mettre en place des concours auprès des établissements scolaires avec le soutien du Rectorat de l’académie de Clermont-Ferrand.


B. À la découverte de Clermont-Ferrand et de ses trésors culturels et mémoriels


1) La ville de Clermont a construit son développement touristique sur la diversité de son patrimoine. C’est aujourd’hui sa force. Musées et églises, places et parcs, vues panoramiques sur le Puy-de -Dôme et la chaîne des volcans se succèdent, égrainant une histoire millénaire. Ils donnent vie et âme à la cité depuis l’emblématique place de Jaude où trône les non moins symboliques statues de Vercingétorix et du général Desaix, en passant par la cathédrale si singulière avec sa couleur noire anthracite, la fontaine d’Amboise, l’hôtel de Fontfreyde, en poursuivant par la basilique Notre-Dame-du-Port et les musées Lecocq et Bargoin pour finir au Jardin botanique Lecoq. Mais la ville a aussi connu des heures sombres et difficiles durant la Seconde Guerre mondiale. Leurs mémoires s’inscrivent en des lieux incontournables et emblématiques de la ville, tels la place de la Victoire, la place de la Poterne, la Faculté des lettres, rue Carnot, et que ravivent monuments, stèles ou plaques commémoratives comme le monument aux morts de la rue Montlosier ou de la place Verlaine à la Plaine.

Pour faire découvrir ces deux facettes de la capitale auvergnate, les étudiants ont imaginé plusieurs circuits complémentaires dans Clermont-Ferrand intra-muros mais aussi dans sa banlieue immédiate comme Chamalières et Orcines. Parmi eux, on peut citer un circuit accessible au plus grand nombre adossé au tram. Les visiteurs peuvent ainsi être conduits de monuments touristiques en monuments mémoriels. Ce circuit s’inscrit dans une logique de tourisme durable respectueux du territoire et de ses ressources patrimoniales. Il pourrait bénéficier d’une démarche de labellisation « Tourisme et handicap », en ce qu’il est conçu par les choix de modes de transport pour être accessibles par le plus grand nombre y compris les personnes à mobilité réduite.


Les étudiants ont en sus élaboré pour chaque circuit une fiche topo-guide. Cette fiche trace le circuit à emprunter, les sites à découvrir (avec un court commentaire historique). Cette fiche donne aussi quelques informations pratiques sur les prix et horaires d’ouverture des monuments ainsi qu’en complément des adresses de restauration et d’hébergement.


2) Le circcuit « Tram’émoire »


Le circuit « Tram’émoire » débute à la Faculté de lettres, rue Carnot. Elle a été le théâtre, le 25 novembre 1943, d’une rafle par la Gestapo de 145 personnes, principalement des étudiants et professeurs, car elle représentait pour les Allemands un foyer de résistance, suite au repli de l’Université de Strasbourg dès novembre 1939. 56 personnes vont mourir en déportation. Une plaque commémorative a été érigée dans la cour de l’Université. En ces lieux, peuvent être rappelée l’histoire de Sam Braun, un lycéen de Blaise Pascal, ou ravivée la mémoire de Claude Lanzmann, récemment disparu ; des salles de classe portent leur nom en mémoire de leur action héroïque.


On poursuit à pied ensuite vers le jardin Lecoq, poumon vert en plein cœur de ville de 5 hectares, qui a conservé son caractère pittoresque de ses jardins à l’anglaise. Il y a aussi ses grilles d’entrée en ferronnerie ancienne. Il offre aux étudiants de l’Université voisine et à tout un chacun des moments de quiétude. Juste à côté, la Faculté de lettres de Gergovia héberge plusieurs associations qui participent activement à la vie culturelle des étudiants. Des films historiques pourraient y être projetés. À proximité, rue de Rabanesse, une plaque commémore les arrestations du 26 juin 1943 de la cité universitaire Gallia qui hébergeait des étudiants alsaciens.


Puis, par le tramway, on gagne la place de Jaude, centre névralgique de la ville, où quelques grands résistants comme Nestor Perret, Alexandre Varenne, et Émile Coulaudon ont donné leur nom à des rues et squares adjacents.

Les touristes peuvent continuer en direction de la place de la Victoire en empruntant la rue du 11 novembre et/ou la rue des Gras, lieux de passage chaleureux et attrayants bordés de magasins et restaurants avant de contempler la cathédrale et la statue d’Urbain II qui couronne la butte du centre ancien, avant de poursuivre à pied ou en tram vers la rue Montlosier.


Là un monument majestueux a été érigé en 1954 en hommage aux victimes civiles et militaires de la Seconde Guerre mondiale. Il célèbre la fin du conflit indochinois. C’est un monument symboliquement fort qui promeut la résistance, la force, les vertus civiles et militaires et dénonce les souffrances engendrées par la guerre. De là, à une portée d’ascenseur, on découvre une discrète plaque à l’angle des rues Clausmann et Beauregard qui rappelle un événement tragique mais quasi méconnu, celui de l’incendie d’immeubles du quartier, le 8 mars 1944, en représailles à un attentat contre des soldats allemands.


La basilique Notre-Dame-du-Port, classée au patrimoine mondial de l’UNESCO, est à proximité. Elle offre un moment de sérénité et elle permet d’admirer des chapiteaux parmi les plus beaux des églises romanes d’Auvergne.

Il convient alors de poursuivre par le tram pour descendre à l’arrêt « stade Marcel Michelin ». La visite du musée de l’Aventure Michelin permet de partir à la découverte de l’histoire de la manufacture et de mesurer tout à la fois la contribution de l’usine à l’effort de guerre allemand et la résistance à titre individuel de la famille Michelin.

Non loin, dans la rue d’Estaing une plaque est apposée en mémoire des vingt résistants fusillés le 20 décembre 1943. Ce mur est celui de la caserne du 92e régiment d’infanterie. La caserne fut investie par les Allemands de 1942 à 1944. Ils en firent une maison d’arrêt pour les résistants et les personnes raflées avant leur déportation. Si les lieux ont gardé la mémoire de ces prisonniers, la visite du site demeure exceptionnelle, pour de rares commémorations.


Toujours en tram, les touristes peuvent se diriger vers le quartier de Montferrand, ancienne ville comtale autonome qui a conservé une empreinte médiévale avec de beaux hôtels particuliers. Lors de cette étape, le cimetière invite à se recueillir au carré militaire où sont inhumés 134 maquisards avant de se rendre au musée d’Art Roger Quilliot installé dans l’ancien couvent des Ursulines.


Les touristes terminent leur déambulation mémorielle au quartier de la Plaine, parmi les cités ouvrières Michelin, qui furent le témoin, le 22 juillet 1944, d’une grande rafle. Ce quartier était un centre de résistance actif et, pour se souvenir, les habitants ont lancé une souscription pour l’édification d’un monument aux morts, place Verlaine. 50 noms y figurent.


Non loin de là, le stade Leclanché rend ainsi hommage à la famille Leclanché si active dans la résistance et qui a connu un destin tragique. Une petite journée permet de couvrir ces 10 kms de déambulation culturelle, mémorielle, historique et artistique, une petite journée pour découvrir la capitale auvergnate sous un autre angle, découvrir une histoire locale encore trop méconnue. Cette connaissance peut s’enrichir par la visite du musée de la résistance de l’internement et de la déportation installé à Chamalières qui présentent plus de 3 000 pièces et par une halte à Orcines pour se souvenir des hommes du maquis des Ardents pour ne rester que sur l’agglomération clermontoise.

Ce projet a permis aux étudiants d’acquérir un ensemble de compétences et de qualité professionnelles dans le domaine du tourisme ainsi que des connaissances historiques. Ils ont surtout ressenti une grande fierté à faire partie de ces passeurs d’histoire, de ces ambassadeurs de la mémoire, et peut-être d’avoir contribué par leurs propositions à faire resurgir une dimension historique qui a forgé l’identité auvergnate. Ils ont été également très fiers et très sensibles pour la confiance que l’association AMRC leur a faite en leur confiant cette mission
originale et émouvante.


Ces démarches se poursuivent en 2019 avec l’ AMRC, et en 2020 avec la section du Puy-de-dôme de la Société des membres de la Légion d’honneur pour étendrere11 la démarche sur de nouveaux périmètres, en espérant que les propositions trouveront échos et intérêt auprès des acteurs touristiques locaux comme les offices de tourisme, mais aussi auprès des acteurs engagés dans la valorisation mémorielle, et que très prochainement les chemins de la mémoire trouvent un ancrage sur les routes auvergnates.


1EcoDef (Bulletin de l’observatoire économique de la défense), n° 99, octobre 2017, page 1.
2Voir le site https://www.entreprises.gouv.fr/tourisme/tourisme-memoire-france.

3 François Cavaignac et Hervé Deperne, « Les chemins de mémoire, une initiative de l’État », Cahiers Espace, n° 80, décembre 2003, page12.
4 Voir le site https://www.defense.gouv.fr/memoire/memoire/hauts-lieux-de-memoire.
5 Voir le site https://www.20minutes.fr/economie/2238423-20180316-pourquoi-tourisme-memoire-tant-prosperedernieres-annees.
6 Pierre Nora, « De l’archive à l’emblème », Les lieux de mémoire, Paris, Gallimard, 1993, tome 3 « Les France ». C’est un renvoi à l’ouvrage en général…
7 Les premiers ont été érigés en 1870 au lendemain de la guerre franco-prussienne

8 http://pro.auvergne-tourisme.info/docs/2116-1-chiffres-cles-du-tourisme-en-auvergne-edition-2115.pdf

9 Jacques Lacarrière, Chemin faisant, Paris, La Table ronde, 2017, nouvelle éd. remaniée (1ère éd. Fayard 1977), p. 345.
10 Voir https://www.puy-de-d ome.fr/territoires/tourismes/randonnées.html.

11 SMLH63.fr

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