Patrimoine, tourisme et mémoire

Commémoration des 79 ans de la rafle universitaire

Université de Clermont-Ferrand – Strasbourg

Tourisme de mémoire : la professionnalisation de ses acteurs

Christine Lechevallier, chargée d’enseignement UCA

Nombreux sont les territoires français qui portent en eux le souvenir des deux guerres mondiales. La trace des combats demeure palpable dans les paysages et sur les murs des villes. Les cimetières de Normandie ou du Nord, les ruines de la maison forestière du Mont-mouchet ou du village de Oradour-sur-Glane, les reconstructions de villes emblématiques comme Le Havre, ou des monuments comme le palais de justice de Rouen avec des impacts d’obus, les plaques rendant hommage aux combattants et aux victimes1 sont autant de stigmates et de témoignages vivants gravés dans la pierre. Ils sont également gravés dans l’esprit de chacun des habitants de ces lieux et font partie d’un patrimoine commun, « mêlant une mémoire personnelle à une mémoire collective, celle d’un groupe, d’une ville ou d’un pays » 2.

La première utilisation officielle du terme “tourisme de mémoire” se trouve dans une loi du 21 mai 1947 “relative à la conservation du souvenir du débarquement allié en Normandie”3, confiant au comité du débarquement la mission de commémoration. Il crée alors le premier musée du Débarquement à Arromanches-les-Bains en 1954.

La Normandie, les hauts de France ou encore le grand-Est sont devenus des terres de mémoire et d’histoire emblématiques de la France et depuis la fin du 20ème siècle des destinations touristiques prisées où des visiteurs de tous pays et de toutes générations viennent marcher sur les traces de ceux qui ont combattu pour la liberté. Au delà de ces seules régions, le tourisme de mémoire attire chaque année des millions de visiteurs sur l’ensemble de la France. S’il est porteur d’enjeux civiques et pédagogiques pour la transmission mémorielle aux jeunes générations, il devient aussi un vecteur culturel et touristique de poids favorisant le développement économique des territoires.

Cette offre mémorielle va au delà d’une simple présentation d’objets ou de panneaux relatant des événements et des combats. «Les lieux de mémoire sont aujourd’hui des lieux d’échanges mais aussi de réflexion sur l’histoire»4 et cette valorisation des sites mémoriels s’ intègre désormais à l’offre touristique et culturelle traditionnelle. Des compétence solides sont requises pour l’ensemble des professionnels de la filière depuis les gestionnaires, les animateurs, les chargés de projet ou de médiation jusqu’au guide-conférencier. Les parcours de formation doivent s’adapter à cette dynamique afin d’offrir des compétences multiples et pluridisciplinaires correspondant aux nouveaux enjeux culturels et touristiques du tourisme de mémoire.

La conception du tourisme de mémoire du 21ème siècle (I) s’ouvre sur de nouvelles approches muséographiques (II) et fait appel à l’expertise de la filière professionnelle (III). Depuis plus de cinq années maintenant, le master ‘’direction de projets et d’établissements culturels -accompagnement culturel et touristique des territoires’’ de l’Université Clermont Auvergne a pris en compte ce tourisme dans son parcours pédagogique, en proposant une expérience professionnelle aux étudiants au travers de sujets réels, dans le cadre d’une contractualisation avec des partenaires touristiques et mémoriels, sujets qui viendront illustrer notre propos.

I- le tourisme de mémoire au 21ème siècle

Si le tourisme de mémoire s’est développé au cours du vingtième siècle, son approche a fortement évolué(A, suscitant un intérêt constant des visiteurs (B) tandis que les sites mémoriels deviennent des lieux de pédagogie (C).

A- Du souvenir à l’histoire

La France est le pays possédant le plus important patrimoine de mémoire au monde. Monument aux morts, ossuaires, cimetières, plaques commémoratives maillent le territoire français inscrivant dans la pierre de façon indélébile la mémoire des deux guerres mondiales.

Dès 1917, avant même la fin de la Première Guerre mondiale, les champs de bataille font l’objet de pèlerinages, principalement les anciens combattants et leurs familles. Certains sites deviennent des lieux de commémorations officielles s’accompagnant de la construction de monuments commémoratifs. Entre 1960 et 1980 des musées apparaissent. leurs collections centrées sur la narration des événements présentent les reliques et les souvenirs des anciens combattants ou des résistants eux-mêmes. À partir des années 1990, avec la disparition progressive des protagonistes et des témoins, une prise de conscience sur les enjeux liés à la mémoire locale émerge. Les médiateurs culturels s’en emparent en mettant en place, une politique, une stratégie mémorielle où les ambitions civiques et pédagogiques sont clairement affichées. Elles visent à la transmission de la mémoire aux générations qui n’ont pas connu ces événements, qui n’ont pas vécu la guerre.

@ Richard Lechevallier : Le Mont Mouchet, lieu de Mémoire, Le musée du Fort de la Pompelle à proximité de Reims, Le mémorial Charles de Gaulle à Colombey-les-deux-Eglises.

Dès lors, plusieurs types d’évocations des deux conflits sont proposés : tout d’abord, le “lieu de mémoire”, il désigne des sites liés à des violences guerrières comme les champs de bataille, les camps de concentration. Mais, pour Pierre Nora5 , un lieu de mémoire n’est pas seulement un lieu géographique, « il va de l’objet le plus matériel et concret, éventuellement géographiquement situé, à l’objet le plus abstrait et intellectuellement construit6 ». Vient ensuite, le mémorial, qui se consacre à la conservation de la mémoire d’acteurs des conflits tandis que le musée, lui, se focalise sur la conservation et la présentation d’objets. Enfin, les historiaux et les centres d’interprétation, quant à eux, apparaissent à partir des années 1990  et ils s’orientent vers une démarche didactique. Malgré une terminologie différente et une approche qui se veut différente, les publics ne perçoivent pas toujours les nuances, et les visiteurs les désignent spontanément sous le vocable de musée. Ils possèdent en commun une fonction intégrative et une fonction de transmission de la mémoire au sein de nos sociétés, car ce sont des espaces de partage mémoriel7.

Paradoxalement, alors que cette histoire s’éloigne de plus en plus l’offre de tourisme de mémoire ne cesse de se développer. Les structures existantes renouvellent leur offre tandis que de nouvelles apparaissent. Ainsi à titre d’illustration, le Mémorial de l’internement et de la déportation de Compiègne a été créé en 2008, le musée de la Grande Guerre du pays de Meaux a ouvert en 2011, et le musée mémorial du Chambon-sur-Lignon a été inauguré en juin 2013 .En parallèle, à partir des années 1990, la notion de « tourisme de mémoire » se généralise. le tourisme mémoriel ne se développe pas exclusivement sur le lieu de l’événement historique, des musées peuvent être des lieux de mémoire, sans être des lieux d’histoire. Aujourd’hui, Le tourisme de mémoire est plus conçu comme un tourisme « éducatif ». Simone Veil ne disait-elle pas «  Je n’aime pas l’expression devoir de mémoire. Le seul devoir, c’est d’enseigner et de transmettre. ». Dans cet esprit, le tourisme de mémoire vise à répondre aux besoins de compréhension et d’interprétation des lieux de combats et de mémoire, dont le sens échappe aux générations contemporaines. En effet, l’explication des événements militaires et l’hommage aux combattants ne peut plus se limiter à la seule narration des batailles comme il a été conçu et organisé à ces débuts, « le discours n’est plus seulement militaire, mais aussi humain, et s’intéresse à tous les acteurs et à toutes les victimes du conflit»8.

A Thiepval, Du mémorial du Lutyens inauguré le 1er août 1932 au centre d’interprétation ouvert en 2004, toute l’évolution du tourisme mémoire se lit entre ces deux monuments, passant du lieu de pèlerinage au lieu de médiation muséographique. Plusieurs chercheurs s’accordent à constater une mutation du tourisme de mémoire, liée à un à changement de paradigme, à une modification en profondeur de sa nature, de ses pratiques et des ses motivations. L’époque des pèlerinages est révolue, les vétérans ne sont plus qu’une poignée. Pour Anne herzog9, les sites perdent leur symbolique ‘’reliquaire’’ pour entrer dans une nouvelle phase historique et culturelle. «Les pèlerinages changent progressivement de nature, l’histoire prend le relais de la ferveur»10. Cependant, Dominique Camus estime que « Le tourisme de mémoire participe à la construction – à la reconstruction pourrait-on dire – d’une nouvelle identité pour ces territoires. Il accompagne les habitants de ces territoires marqués par les drames et le poids de l’histoire, dans une nécessaire évolution, une salutaire reconversion, qui, de terre d’invasion les amène à devenir terre d’accueil. ». Néanmoins comme le souligne un élu de la Somme « Il est difficile d’asseoir le développement touristique et la valorisation d’un territoire sur des souvenirs aussi douloureux  […]. On ne peut pas envisager le tourisme de mémoire de la même façon que l’on développe le tourisme balnéaire, le golf, ou la randonnée […]. La mise en tourisme de ces lieux de mémoire, doit être conforme à l’esprit et aux valeurs de respect et de recueillement qui les caractérisent11». C’est pourquoi les lieux de batailles s’inscrivent aujourd’hui « dans un processus de réappropriation symbolique d’un passé douloureux  partagé […] un lieu d’expression d’un nouvel imaginaire touristique12. Même si la construction contemporaine du tourisme de mémoire est lié à un changement de paradigme, qui impliquent de nouvelles dynamiques, de nouvelles approches créatives et émotionnelles les processus de mise en tourisme se doivent d’être respectueux des lieux de commémorations (ex : les cimetières, les monuments). En effet, les nouveaux paysages mémoriels conservent des valeurs universelles que les gestionnaires doivent faire perdurer par une gestion intelligente et digne des visites, «Le souvenir et les sacrifices de nos ancêtres ne doivent pas être ravalés au rang d’objets de commerce ou de tourisme13».

Cette nouvelle dimension du tourisme de mémoire n’a pas échappé à la Région Auvergne-Rhône Alpes qui s’est engagée avec l’UCA dans une réflexion sur le tourisme mémoriel de demain. Les étudiants ont projeté leurs regards à l’horizon 2050. dans un web documentaire, montrant comment les chercheurs, les universitaires et les professionnels préparent cet avenir14. Plusieurs hypothèses d’évolution du tourisme mémoriel, tant sous une approche scientifique que technique ont été émises. Les hypothèses d’ordre scientifique portent sur le fond même du sujet en terme de contenu alors que les hypothèses d’ordre technique se rapportent à la forme de tourisme. Ainsi dans quelle mesure les évolutions sociétales, scientifiques, touristiques et technologiques transforment-elles le tourisme mémoriel et par la même fait évoluer le devoir de mémoire?. De ce questionnement, il il émerge quelques tendances. Tout d’abord, la mémoire des deux conflits mondiaux tend à se perdre petit à petit ; on n’en parle plus que comme des guerres et moins comme des conflits majeurs. En effet, la guerre est présentée aux jeunes générations par le prisme des séries télévisées ou de jeux vidéo, rien de palpable ni de tangible. La mémoire devient dès lors, une sorte de conte ou de récit. En revanche, si la mémoire directe tend à disparaître, la volonté de se souvenir et de transmettre se fait ressentir et des actions comme les concours autour de la résistance se mettent en place. Par ailleurs, la parole se libère et de nouveaux aspects de la mémoire peuvent apparaître. Néanmoins, la mémoire peut être soumise à une influence politique, manipulée, réécrite, limitée voire interdite. De même, les lieux de mémoire peuvent se retrouver avec le temps confrontés à une certaine décrépitude, et on peut se poser la question de leur conservation dans le temps. Enfin, si les sociétés, les mentalités opèrent un changement radical, la conception de la mémoire risque fort elle aussi de changer, ou de se trouver enfouie sous une mémoire traumatique plus récente qui nécessite une sauvegarde, une commémoration et une transmission. La mémoire et ses lieux apparaissent donc comme un cycle de renouvellement influencés par l’arrivée de nouveaux événements et l’évolution des centres d’intérêts. Mais il est, aujourd’hui, quasi impossible d’imaginer les centres d’intérêts qui animeront nos concitoyens dans 30 ou 50 ans.

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Touriste ou visiteur ?

Selon l’Organisation mondiale du tourisme, le tourisme est le fait de se déplacer hors de son environnement habituel pour une durée d’au moins une nuitée et d’un an au plus. Au regard des déplacements qu’il engendre, le tourisme de mémoire répond bien à la définition. Et le touriste qui est-il ? C’est la personne qui voyage pour son plaisir, pour se détendre, s’enrichir, se cultiver et qui pratique des activités extrêmement variées. Dans ce contexte la rencontre avec la mémoire peut participer à une activité touristique. Cependant le terme de touriste ne parait pas toujours approprié au regard de la démarche et des attentes, celui de visiteurs semble plus adéquat15. En effet le visiteur est celui qui se rend dans un lieu par plaisir et pour le découvrir, mais c’est aussi une personne qui va volontairement au domicile de quelqu’un pour le voir. Le touriste de mémoire n’est-il pas ce visiteur tout à la fois motivé par la rencontre et la découverte d’un passé, d’une histoire ou de son histoire ? car Pour Serge Chaumier  le musée est toujours le lieu d’une rencontre entre un public et une offre culturelle qui s’opère le temps de la visite16

Trois catégories de visiteurs sont à distinguer17 : en premier lieu, les personnes ayant un rapport personnel avec le lieu, soit parce qu’ils ont été acteurs de l’événement ou un de leur ancêtre l’a été, ou sont intéressés par la recherche généalogique. Viennent ensuite les visiteurs motivés par une démarche scientifique ou pédagogique. En Alsace, un quart des visiteurs cherchent à s’informer en profondeur sur l’histoire du lieu18, les voyages d’études et plus particulièrement les voyages scolaires ont également tendance à augmenter. Enfin, bon nombres de personnes visitent les lieux en tant qu’attraction touristique ou culturelle, la grande majorité souhaitent découvrir les sites dont ils ont entendu parler lors des cycles commémoratifs. 12% des visiteurs ont connu les sites de mémoire via les médias grand public19. Par ailleurs, de plus en plus de visiteurs en quête de racines souhaitent aborder le passé militaire et guerrier non plus centré sur les grandes figures militaires mais davantage sur les humbles soldats retrouvant ainsi en eux, leurs ancêtres.

@ Richard Lechevallier. Cimetière autrichien de Villers le Bretonneux, Mémorial de Thiépval, Musée d’ Eperlecques, La pointe du Hoc, Micemtière de Colleville, Monuments au morts des armées de champagne et traces de tranchées.

Comme le montre l’enquête conduite par Myriam Jansen-Verbeke et Wanda George20, la finalité des sites mémoriels est d’être, tout à la fois, des lieux de souvenir, de prise de conscience de la souffrance humaine, d’apprentissage de l’histoire, de réflexion, des moyens de dissuasion pour de futurs conflits, le rappel qu’un pays vaut la peine « qu’on se batte et qu’on meure pour lui »21. De même, l’authenticité des lieux d’histoire et l’intégrité des souvenirs sont des conditions essentielles pour un développement durable de ce patrimoine. 90 % des personnes interrogées estiment que les sites patrimoniaux doivent garder intact le caractère sacré de « ce qui s’est réellement passé là »22 Les lieux de mémoire des conflits contemporains ont accueilli près de 12 millions de visiteurs en 2017, et plus 15,2 millions  d’entrées en 2019, dont 1,3 millions sont des scolaires et 3,4 millions des touristes étrangers23. 87% se concentrent dans les régions de Normandie, des hauts-de France, de l’Ile-de-France, et du grand-Est. la Normandie demeure la plus attractive avec plus de6,4 millions de touristes24 fréquentant principalement le cimetière américain d’Omaha à Colleville-sur-Mer. En 2016, la fréquentation des lieux de mémoire de la région Auvergne-Rhône-Alpes s’élevait quant à elle à 316 000 visiteurs25.

C- De l’école au musée

En entrant dans « le Temps de l’Histoire »26, le tourisme de mémoire se tourne résolument vers la pédagogie et la compréhension, confiant cette mission aux musées. En effet, un des objectifs premiers des musées est bien l’appropriation des contenus. Dès lors, la pédagogie est mise au service de la transmission. Des outils pédagogiques vont être élaborés à cet effet par des professionnels pour des publics cibles, en particulier les scolaires. La sortie scolaire en musée représente la plupart du temps pour les enseignants un moyens d’approfondir un thème abordé en classe et de favoriser l’ouverture culturelle. Les élèves sont alors incités à parcourir l’exposition selon un ordre établi et à répondre à des sollicitations, à des questionnaires en rapport direct avec le programme scolaire. Dans cette visite, le « guide » tient une place centrale, note Cora Cohen-Azria27 L’élève est donc tenu d’apprendre et d’écouter, il n’est pas libre de déambuler, de découvrir par lui-même, d’avoir le plaisir de découvrir.

Cependant, de plus en plus de musées souhaitent rendre l’élève acteur de sa visite, et propose aux enseignants des ateliers pédagogiques co-construits via les ressources des réseaux Canopé et Universcience qui leur permettent de mieux préparer leur visite, en leur donnant des clefs de lecture de l’exposition. Le Mémorial de Verdun s’inscrit dans cette démarche. Son pôle médiation met à disposition des outils pédagogiques pour aider les enseignants proposant des témoignages d’anciens combattants, des ateliers comme « reporter de guerre de Verdun » pour les élèves de primaires, ou encore une plateforme de cours en ligne. De même, le Musée de Meaux présente pas moins de dix-sept ateliers28 pour différents cycles, notamment l’atelier « correspondance de guerre » qui invite les élèves à incarner un soldat écrivant à ses proches sur des reproductions de cartes postales issues des collections du musée. A cette occasion, ils utilisent même des matériaux de l’époque. Un autre atelier offre aux élèves la possibilité de créer un album de la grande guerre sur lequel ils travaillent en groupe, observent les photos proposées, les sélectionnent, et rédigeent leurs légendes.

Dans cette nouvelle conception de la visite scolaire, où tout est encore à imaginer, le médiateur continue de jouer un rôle essentiel pour accompagner, orienter, aider les élèves à interpréter ce qui leur est donné à voir, mais aussi pour pour se concevoir en visiteur. L’atelier pédagogique devient un espace ouvert, qui permet aux jeunes publics de faire ce qu’il est bien souvent impossible de faire dans l’exposition à savoir utiliser son corps, manipuler des objets, débattre, privilégiant alors des pratiques plus ludiques29. Les ateliers offrent une « forme vécue de la connaissance et non pas un savoir abstrait »30, ils visent à l’épanouissement de l’enfant au sein du musée tout en suscitant une activité intellectuelle et affective qui va faire naître le plaisir.

II- La professionnalisation de la filière

Le tourisme de mémoire ne doit pas être considéré comme une expérience marginale, il est une destination reconnue qui s’inscrit dans l’offre culturelle actuelle. La mise en réseau (A) et des compétences solides (B) vont contribuer à une valorisation non seulement des sites mais de l’ensemble du territoire.

A – construction de réseaux

Si Les chiffres de fréquentation des musées, mémoriaux et centres d’interprétation ne cessent de progresser, cette offre touristique spécifique doit s’insérer dans l’offre culturelle, en particulier historique, au même titre que les grandes figures nationales telles Louis XIV ou Napoléon. Plus globalement elle doit être complémentaire de l’offre touristique traditionnelle. Ainsi, l‘Etat a confié à Atout-France la mise en place de Contrats de Destination pour aider au développement du tourisme de mémoire. Ce type de contrat avec les territoires a pour objectif d’une part d’accroître les flux touristiques et les retombées économiques, d’autre part d’améliorer la qualité de l’accueil et de renforcer l’attractivité de la France sur les marchés étrangers. Il se déploie autour de 3 volets d’actions. Le volet ‘’ingénierie’’ aide les partenaires à structurer leur offre, le volet ‘’observation’’, permet de mesurer l’évolution du poids de la filière sur le territoire, et le volet ‘’promotion’’ accompagne le développement d’outils de médiation innovants. Cette offre d’excellence à visibilité internationale passe entre autre, par la mise en place d’un label ‘’Qualité Tourisme’’ spécifique aux lieux de mémoire tels “Grande Guerre” et “Tourisme de mémoire en Normandie” dont Atout-France assure la promotion. Le tourisme de mémoire est la principale thématique de visite en Normandie et La marque «  DDay NormandieTerre de Liberté » couvre 94 sites et lieux de visites mémoriels.

Dans ce dispositif, Le ministère des armées est un acteur incontournable du tourisme de mémoire. En tant que porteur de la politique de mémoire, il est devenu le deuxième opérateur culturel et à ce titre un partenaire à part entière pour les territoires de mémoire. En effet, il assure la gestion et la valorisation de son propre patrimoine historique et mémoriel riche et varié (sépultures, musées, sites mémoriels), et finance la rénovation des nécropoles et de hauts lieux de la mémoire nationale. il participe également à la création ou la rénovation de centres d’interprétation, de musées et de mémoriaux engagée par les collectivités locales et les associations. Il apporte aussi son soutien financier à divers projets commémoratifs : exposition et publication ou favorise l’émergence d’actions par des appels à projets en particulier avec l’action “Services numériques innovants” pour accompagner les changements induits par les nouvelles technologies. Une vingtaine de projets ont déjà été soutenus, comme le Mémorial du Camp des Milles à Aix-en-Provence ou le Centre d’étude et de recherche sur les camps d’internement dans le Loiret et la déportation juive (CERCIL)31.

Au delà de ces actions ciblées, le ministère des Armées, via sa Direction des Patrimoines, de la Mémoire et des Archives (DPMA) anime depuis 2006, le Réseau des Musées et Mémoriaux des Conflits Contemporains (MMCC)32 afin de fédérer les sites dans une offre mémorielle cohérente. Il s’agit d’un réseau professionnel où chacun s’implique tant au niveau des outils de structuration (observatoire, démarche Qualité …) que de la dynamique du réseau (séminaires, échanges d’expérience …). De 15 sites au départ, le réseau s’est progressivement étoffé pour atteindre 130 sites adhérents qui accueillent plus d’un tiers des visites des sites mémoriels. Ce réseau professionnel favorise les synergies entre ses membres, coordonne leurs initiatives et facilite leur insertion 33. En effet, c’est près de 10 000 personnes qui travaillent dans un lieu de mémoire des conflits contemporains34. Le ministère des armées veille également à ce que la mise en réseau se fasse dans une offre élargie aux autres sites culturels et touristiques sur l’ensemble du territoire national.

Ce réseau n’est pas le seul. Avec le centenaire de la Grande Guerre qui a apporté une nouvelle dimension au tourisme de mémoire, le réseau Mem’Histo s’est constitué au niveau des Hauts-de-France. Il réunit 14 structures porteuses de la mémoire de la Première et de la Seconde Guerre mondiale, mais aussi de la mémoire ouvrière et industrielle. les acteurs locaux du tourisme ont pu faire évoluer leur offre en déployant une nouvelle stratégie touristique cohérente et intégrée à l’offre globale. Bien que moins méconnu, La région Auvergne-Rhône-Alpes fut aussi le théâtre d’actions résistantes d’envergure. Elle « raconte aujourd’hui son histoire à l’aune des musées, mémoriaux et centres d’histoire »  comme les Sites emblématiques des Glières ou du Mont mouchet ou des lieux plus discrets, tels Vic-sur-Cère ou le Chambon-sur-Lignon. « Tous témoignent de l’engagement des territoires, « à travers les différentes formes de résistance (combattante, civile, intellectuelle, spirituelle, urbaine ou rurale) et de solidarité comme à Vic-sur-Cère (Cantal) ou au Chambon-sur-Lignon (Haute-Loire) »35. Ce sont autant de lieux que l’association Mémorha fédère depuis 2011 à l’échelle du territoire et accompagne dans la mise en place de projets de valorisation culturels et scientifiques afin de faciliter la cohérence de leur offre culturelle et mémorielle36.

Si L’État et les collectivités locales occupent une place importante dans le paysage mémoriel, le monde associatif s’implique fortement dans la valorisation et le dynamisme des lieux de mémoire en apportant son soutien bénévole aux structures mémorielles. Ainsi, 41 % des sites mémoriels français sont gérés par des associations ou fondations contre 31 % par les collectivités, et ils emploient 73 % des personnels37. Le Mémorial de verdun est un exemple de cette collaboration. Inauguré en 1967, il a été voulu par les anciens combattants, et notamment par l’écrivain Maurice Genevoix. Aujourd’hui encore, les anciens combattants par le biais de la Fédération Maginot et de la Fédération des blessés de la face (« les gueules cassées ») sont toujours présents en tant que membres du conseil d’administration38. Par ailleurs, des musées sont constitués à partir de collections privées, comme le musée « Guerres et paix dans les Ardennes » de Novion-Porcien, exposant 14 000 objets dont de nombreux matériels lourds ou le mémorial du Paysan soldat à Fleuriel. De même, restaurés par des associations de passionnés, puis ouverts au public, certains ouvrages de la ligne Maginot comme Le fort de Schoenenbourg ont été transformés en musées. Bien que très érudits sur les contenus, les animateurs de ces sites ont compris que leur démarche muséographique n’était pas adaptée et qu’il leur fallait acquérir une crédibilité scientifique39 et à ce titre font donc appel à des professionnels.

Dans le parcours mémoriel, les associations deviennent également des partenaires du système de formation des futurs professionnels du tourisme et de la culture, comme c’est le cas avec l’UCA. Elles permettent ainsi aux étudiants d’appréhender la dimension mémorielle par des mises en situation concrète. Les sujets proposés permettent de s’immerger dans des problématiques actuelles, d’apporter un regard novateur, et de se confronter à l’opérationnalité de leurs propositions. Ainsi, avec la Société des membres de la légion D’honneur (SMLH) les étudiants ont été amenés à concevoir sur l’ensemble du département du Puy-de-Dôme différents itinéraires de randonnées animés, mêlant dans un même parcours, patrimoines locaux et histoire de la seconde guerre mondiale. En recherche d’un diagnostic et de propositions innovantes, l’historial du Paysan-Soldat de Fleuriel40 a également ouvert ses portes aux étudiants. Le Musée du Mont-Mouchet était quant à lui en quête d’une diversification de son approche pédagogique. Enfin, l’association des Boucles de la Mémoire a confié à leur perspicacité la réalisation d’une exposition itinérante sur la résistance dans le Puy-de-Dôme.

Autant de sujets de réflexion différents qui démontrent bien les problématiques actuelles de la mise en tourisme des lieux mémoriels. Ces actions sont d’une richesse exceptionnelle pour les étudiants car elles leur permettent dans un premier temps de réaliser un diagnostic non seulement touristique, mais aussi territorial afin de bien situer la structure dans son environnement et de contextualiser le projet. Le second temps porte lui sur des propositions réalisables techniquement, financièrement et politiquement. Ils acquièrent alors de solides connaissances sur les institutions de l’État, territoriales et associatives, sur leur positionnement, leur statut juridique, leurs rôles et missions. Au delà, de cette acquisition de compétences, les étudiants redécouvrent une période, abordent des événements non plus de façon scolaire, mais avec une dimension citoyenne qui les interpelle. Ces mises en situation sont toujours pour eux, très révélatrices tant humainement que professionnellement.

B- professionnalisation des acteurs au regard des enjeux de médiation

@Richard Lechevallier. Les sites de Normandie

Aujourd’hui, tous ces acteurs associatifs ou publics ont une approche nouvelle du tourisme de mémoire, plus tournée vers l’histoire que le souvenir, avec une réflexion plus collective sur les enjeux actuels de transmission de l’histoire des conflits contemporains. En effet, le tourisme de mémoire prend une forme particulière dans l’activité touristique car il ne s’agit pas de prime abord de voyager, et le divertissement n ‘est pas non plus l’objectif premier.  le but affiché de la plupart de ces lieux de tourisme mémoriel est de permettre au public de comprendre l’histoire le plus objectivement possible. L’effort est donc mis sur la qualité du propos historique et pédagogique 41 mais aussi sur la qualité de l’accueil du visiteur.

Cette médiation mémorielle est en évolution constante. De nouveaux enjeux ont émergé ces dernières années. Il s’agit tout d’abord, de répondre à une attente touristique qui porte aujourd’hui sur des activités qui concilient tout à la fois loisirs, découverte, et environnement tout en proposant des expériences de visite qui respectent l’histoire et les lieux, et apportent un nouveau regard, un nouvel angle de découverte. Il est donc important de savoir réaliser des diagnostics, conduire une analyse prospective, des enquêtes, recueillir des données sur les comportements des visiteurs, leurs pratiques touristiques et de consommation. De plus, à l’aube du 80e anniversaire du débarquement de Normandie, les vétérans ou témoins du conflit se font rares et ce lien direct avec les faits va disparaître. Il faut donc d’ores et déjà se préparer à un nouveau mode de transmission intergénérationnelle.

Même si les expositions permanentes continuent de constituer le coeur de métier, l’offre, elle aussi, devra évoluer pour passer d’un tourisme de souvenir à un tourisme d’histoire, avec la mise en œuvre concomitante de nouveaux outils de médiation : des présentations différentes, des ateliers, des audioguides, des livrets de visites et autres applications multimédias.

La recherche d’une nouvelle clientèle tels les jeunes et la fidélisation des clientèles de proximité est également une préoccupation à prendre en compte par chaque gestionnaire de site. Pour cela il doit savoir adapter sa muséographie, avoir des approches nouvelles et diversifier ses publics aux d’attentes différentes. Les expositions temporaires offrent un renouvellement régulier des présentations et par conséquence attirent un public nouveau ou incitent celui connaissant déjà le musée à revenir. Une programmation culturelle avec des événements peut venir compléter l’offre première. Des concerts, des journées d’études en lien avec des universitaires, des sorties sur le terrain à la rencontre de personnages emblématiques comme le capitaine Delvert (1879-1940)42 à la bataille de Verdun peuvent être réalisées.

Une analyse des attentes des visiteurs s’avèrent dès lors nécessaire à l’instar de celle produite par les étudiants lors de la création de l’exposition sur la Résistance dans le Puy-de-Dôme. Une enquête conduite auprès de 500 jeunes de 14 à 20 ans a permis de déterminer leurs attentes : une mise en récit plus humaine et moins scolaire, des panneaux avec des textes concis, une illustration attrayante, mais plus surprenant l’accroche numérique via le QR code n’est plus aussi prisée.

La créativité , l’innovation, la sensibilité, l’écoute sont autant de compétences à développer avec le respect, la rigueur et la dignité qui doivent être portés dans la narration des événements. En effet, «  le tourisme de mémoire reste une thématique sensible, impliquant de transmettre aux jeunes générations des offres qui font écho aux valeurs portées par la destination, en s’appuyant sur des connaissances précises et approfondies, dans un souci permanent d’excellence..43 ».

Cette volonté ne laisse pas de place à l’amateurisme, à l’instar de la Normandie qui a construit son ambition autour de deux axes44 : d’une part « Le passage d’un tourisme de mémoire à un tourisme d’histoire avec le besoin d’ancrer les faits et le discours dans une vision contemporaine de l’histoire » ; d’autre part « L’excellence de la destination avec pour objectif de structurer, qualifier, développer l’ensemble de la chaîne de services dans un souci constant de satisfaction du visiteur». Des démarches stratégiques et prospectives se doivent d’être développées en se donnant des objectifs ambitieux.

A cet égard, les personnels doivent pouvoir s’appuyer sur les compétences acquises durant leur formation pour mettre en place un management de destination. Cela nécessite également une bonne connaissance des missions des acteurs institutionnels comme Atout-France ou les compétences dédiées aux collectivités locales en matière de tourisme et culture. Enfin, améliorer la qualité d’accueil par un label tel« Qualité Tourisme Lieux de mémoire » impose la réalisation d’une charte à partager avec les structures d’accueil parteniares (musées, organismes de transport, hôteliers…), où force de conviction et communication sont les fondements de l’action.

Le Mémorial du Camp de Rivesaltes, inauguré en octobre 2015 est un autre exemple des compétences à mobiliser pour la réalisation d’un projet mémoriel. Il « est le fruit de concertation tant politique que scientifique, mais aussi pédagogique et mémorielle, » 45 . Il a été pensé comme un lieu d’histoire et de mémoires, mais à travers une programmation scientifique et culturelle riche à destination essentiellement de la jeunesse. Il  s’ouvre aujourd’hui sur le monde contemporain.

Le tourisme de mémoire peut aussi se décliner en « hors murs » en proposant aux publics des itinérances mémorielles sous la la forme de parcours urbain ou de “randos mémoire” thématiques, qui rallient des structures muséales, des monuments commémoratifs entre eux mais également avec d’autres sites patrimoniaux, architecturaux, naturels, ou à des sites voisins peu ou pas valorisés. Par exemple, Le mémorial de Caen propose en complément, des circuits guidés sur les plages du débarquement ou dans la ville. Guide-conférencier, audio-guide peuvent accompagner le randonneur. Pour les initiateurs de ces randonnées, des compétences cartographiques, géographiques et environnementales sont indispensables pour la création d’itinéraires variés. Ces parcours de randonnées physiques peuvent être associés à des parcours virtuels, comme le “TimeTravel” qui montre le patrimoine présent dans la baie du Mont-Saint-Michel. De plus en plus souvent, les lieux de mémoire sont ainsi reliés à d’autres monuments historiques, et contribuent à l’émergence du slow tourism46. Le Réseau Mémorha a élargi son champ d’investigation en créant, Mémospace. Cet outil conçu comme une plateforme de développement, de partage et de valorisation des connaissances aide à l’organisation de séjours touristiques et de parcours de visite thématisés. Une carte interactive ludique et intuitive recensant un grand nombre de sites dont certains méconnus est au cœur du dispositif. Pour chaque lieu ou parcours de mémoire répertorié, elle donne accès à des fiches détaillées.

Les étudiants de Master1 de l’ UCA, se sont essayés à cette exercice difficile de construire des randonnées autour de la mémoire. L’ensemble du département du Puy-de-Dôme fut leur terrain d’expérimentation. Au delà du diagnostic territorial qu’ils ont produit, ils sont devenus le temps d’un semestre : chercheur, historien, cartographe, géographe, enquêteur, prospecteur, designer, conférencier, écrivain. Dans ces parcours, ils ont mêlé faits de résistance et lieux touristiques emblématiques ou curiosités locales, patrimoines et jeux. Ils ont également proposés des moyens de déplacements variés : motorisés, pédestres ou équins, afin de pouvoir s’adresser à toutes les sensibilités, mais également à toutes les situations familiales. Ces balades s’ouvrent à tous les publics, et peut répondre à des centres d’intérêts divers et ainsi créer dans une activité inter-générationelle un lien de partage et d’échange.

Le ‘’hors-mur’’ peut aussi se concevoir via le musée mobile. Cette démarche consiste à amener le musée et ses collections à la population, à l’instar du MuMo qui arpente les zones rurales et périurbaines avec des expositions des collections publiques d’art contemporain. Ce principe de faire voyager les collections a également inspiré les étudiants qui ont travaillé sur l’historial de Fleuriel et sur l’exposition des combats de la résistance dans le Puy-de-Dôme. Ainsi, ces musées mobiles seraient décorés d’objet issus de la guerre

Cette professionnalisation du réseau mémoriel ne se limite pas aux acteurs direct (gestionnaires des sites et des réseaux, muséographes, guides). Elle nécessite une forte implication de l’ensemble du territoire au travers des acteurs institutionnels, médiatiques, touristiques, culturels, et économiques. En effet, dans certaines régions, la filière du tourisme de mémoire représente un levier économique important générateur de recettes et à ce titre doit participer à la valorisation patrimoniale.

Les offices de tourisme, sont eux aussi mobilisés dans un travail de communication et de promotion des sites. leurs investissements jouent un rôle majeur dans le développement du tourisme de mémoire. Ainsi 12% des visiteurs ont découvert le patrimoine mémoriel Alsacien via leur site internet47. Des actions visant la visibilité des sites et la cohérence événementielle doivent être conduites en partenariat avec l’ensemble des acteurs du territoire, par la création d’outils de communication et de découverte qui pourront faire l’objet d’une large diffusion auprès des hébergeurs, restaurateurs et sur tous les sites touristiques. La communication est une compétence incontournable tant au niveau de la structure muséale, que celui du territoire. L’exemple vosgien démontre bien de l’importance d’une communication cohérente et complémentaire de la part des différents acteurs. Son patrimoine historique a ainsi été promu dans une communication unique pour l’ensemble des sites, intitulée “Front des Vosges 14-18” constituées de panneaux explicatifs, de brochures, ou la publication d’une carte touristique “Traces d’Histoire”. Le magazine Passion Vosges, pour sa part a édité un guide de randonnées intitulé “Sentiers de mémoire de la grande Guerre”48. Enfin des clips destinés à promouvoir les sites de combat et de commémoration de la guerre 14-18 qui jalonnent le massif des Vosges retracent ces moments douloureux de l’histoire.

III- Une muséographie renouvelée

La fréquentation en constante augmentation des lieux de mémoire montre le désir des publics d’en apprendre davantage sur leur passé. Néanmoins, elle demeure étroitement liée au type de muséographie utilisée. Plusieurs options peuvent être retenues par leurs gestionnaires et leurs muséographes comme le démontre les étudiants de master 2 sur deux expériences professionnalisantes.

A- L’avènement de nouveaux intérêts touristiques

Historial du paysan-soldat de Fleuriel (03) @ Richard Lechevallier

L’Académie Française définit la muséographie comme « l’ensemble des techniques utilisées pour la présentation et la mise en valeur des collections, des pièces d’une exposition ». En ce sens la muséographie peut être considérée comme la science qui s’attache à déterminer le contenu qui va être développé dans l’exposition et transmis au visiteur. Pour s’adapter aux attentes de leur public, les musées ne cessent d’innover donnant aujourd’hui naissance à une muséographie polymorphe que des étudiants ont cherché à identifier 49 dans le cadre d’un projet avec l’historial ‘’du paysan soldat’’ de Fleuriel (03) qui les a accueilli. Dans un premier temps, ils ont réalisé un benchmarking des structures culturelles présentant des médiations innovantes. A ce stade, il s’agit non pas de copier, des muséographies existantes, mais de puiser des sources d’inspiration à travers différentes stratégies de médiation et de muséographie, d’en analyser leurs intérêts mais aussi leurs limites, au regard de la nécessaire rigueur historique et de l’éthique. Viendront ensuite les propositions pertinentes et adaptées à l’historial, propositions qui visent à renouveler l’expérience muséale et stimuler le territoire d’implantation50 tout en répondant à des enjeux d’accessibilité et de transmission.

Ce travail de benchmarking a permis également une prise de conscience des différents métiers et des compétences concourant à la vie d’un musée. Celle-ci ne se résume pas à un rassemblement d’œuvres en fonction d’un thème. Au contraire, chaque pièce est choisie avec réflexion et sa place définie avec minutie. Il appartient au muséographe de définir la thématique, les objectifs, le public ciblé et les attentes pédagogiques. Il sélectionne également les objets à présenter et les conditions de présentation. Il définit aussi le parcours, l’ambiance et imagine les supports d’information à créer (panneaux, audiovisuels, maquettes, bornes interactives, jeux…). Garant du bon fonctionnement de l’exposition et de son contenu, le muséographe travaille le plus souvent en équipe. Il assure le lien entre les différentes personnes intervenant dans le projet, c’est-à-dire d’un côté les scientifiques (chercheurs, conservateurs, documentalistes) et de l’autre les professionnels chargés de la concrétisation de l’exposition dont le scénographe. Il ne faut d’ailleurs pas confondre cette dernière fonction avec celle du muséographe. Le premier s’occupe de la forme de l’expositio51, tandis que le deuxième est en charge de la création du contenu. Il avant tout un professionnel de la mise en scène. Au sein d’un musée, il a pour mission de concevoir l’agencement de l’exposition, afin de lui donner une meilleure visibilité, et permettre une circulation fluide des visiteurs. Il peut aussi suggérer une organisation scénique, proposer des décors et autres accessoires en accord avec l’univers défini.

B- La muséographie esthétisante

Musée de la Libération de Paris @ Richard Lechevallier (Affaires ayant appartenues d’une part au général Leclerc, d’autre part à Jean Moulin)

Une première option consiste en la présentation d’objets liés directement ou indirectement à la guerre. Le rôle de l’objet dans un « musée d’histoire est d’être en rapport rigoureux avec le fait historique et d’être porteur à la fois d’une information technique et d’une mémoire individuelle »52. L’information technique est importante car elle ancre l’objet dans la réalité, et les passionnés par exemple, vont attendre des précisions sur le calibre, le poids ou la portée d’un fusil. Mais, au-delà de ces caractéristiques, l’objet a appartenu à un individu, il a servi « objets inanimés avez-vous donc une âme… ».Il témoigne alors de son usage et devient porteur d’une mémoire, celle du grand homme ou du combattant anonyme qui l’a tenu entre ses mains, porteur aussi d’émotions pour le visiteur qui les découvrent. En effet, derrière une photo, une lettre, un vêtement, il y a un homme, une femme, une vie, et « le visiteur d’aujourd’hui peut appréhender le fait que la guerre n’a pas été menée par des ‘’vieux’’, mais par des hommes et des femmes qui avaient parfois son âge »53.

Les objets exposés ont une force émotionnelle considérable. Ils renforcent l’aura de leur illustres propriétaires, comme par exemple le bâton du maréchal Juin, ou bien transcendent leur anonymat pour témoigner de leur engagement, de la profondeur de leurs convictions, de leur volonté à résister et à garder leur dignité. La muséographie va s’articuler autour d’objets emblématiques ou de pièces majeures de la collection du musée qui vont structurer le parcours en séquences cohérentes « avec le triple souci de respecter la cohérence du discours historique, de stimuler l’intérêt du visiteur, et de lui faire vivre un moment agréable et instructif »54.

Des outils de médiation contribuent à la dynamique des parcours. Le premier niveau de médiation est celui directement lié à l’œuvre, matérialisé par un cartel explicatif. Celui-ci peut-être concis en se limitant à un titre et quelques brèves précisions ou offrir des textes explicatifs plus développés voir comparatifs ou contextualisés pour des niveaux d’intérêts différents. Ainsi la présentation d’armes peut conduire à une comparaison des équipements des forces en présence, ou un costume de femme peut ouvrir le sujet sur la place des femmes pendant la guerre. Des cartes, des schémas, des panneaux séquentiels, des maquettes peuvent compléter les informations aux visiteurs. Quelques films peuvent également être projetés sur des bornes ou dans un espace séparé, ils peuvent montrer l’ambiance de la guerre de tranchées ou les combats sur les plages du débarquement. La pertinence et la qualité des outils reposent sur le muséographe, de ses compétences dépend pour partie l’attractivité de l’exposition. En effet, la contemplation seule des œuvres ou du lieu ne se suffit plus à elle même. La muséographie classique sous vitrine crée une certaine distance voire une certaine sacralisation de l’objet par rapport au visiteur qu’il convient aujourd’hui de dépasser.

Cla muséographie numérique et d’immersion

La seconde option est le numérique, un outil ludique et interactif. A travers une médiation innovante, les dispositifs numériques, « véritables outils de transmission de l’histoire »55, viennent enrichir et diversifier les parcours de visite, et proposer des expériences différentes aux visiteurs. L’objectif du numérique est de désacraliser l’objet en vitrine, de le rendre plus accessible et de créer un lien entre lui et le visiteur56. Les musées peuvent proposer des quizz, des cartes interactives, des hologrammes, des jeux sur écrans tactiles.

Hologramme à l’historial du Paysan-Soldat de Fleuriel – @ Richard Lechevallier

De même, des alternatives aux visites guidées classiques sont mises en place en utilisant un chatbot57. Muni de son téléphone portable, le visiteur va dialoguer avec un robot personnalisé et ainsi créer son propre parcours de visite. Ce dispositif se retrouve au Musée de la grande Guerre à Meaux, ou à Utah beach en lien avec l’application mobile « Utah Inside ». Les applications mobiles offrent quant à elles un grand nombre d’informations textes, audios, images d’archives sans contraindre le visiteur dans un parcours imposé. Au contraire, il s’agit de provoquer des allers-retours entre les objets et les contenus58. Toutefois, les étudiants dans leur analyse prospective du tourisme de mémoire59 ont noté une certaine remise en cause du tout numérique. Cette utilisation parfois abusive conduit à une surcharge des scénographies, alors qu’elles devraient aller vers quelque chose de plus simple et de plus sobre dans un souci de clarté et de compréhension du discours historique.

La muséographie d’immersion, pour sa part « tentent de faire comprendre un vécu, une expérience combattante à travers non seulement des objets mais aussi des évocations d’ambiance en ayant largement recours à l’image et à une immersion sensorielle »60. Elle se focalise d’abord sur le visiteur et non sur l’objet et le savoir. Le dispositif tente dès lors de jouer sur les sentiments, les émotions, les sens, en impliquant le visiteur physiquement et mentalement dans l’exposition. En effet, les émotions apparaissent nécessaires pour la compréhension des conflits61. L’immersion peut être convoquée de différentes manières : par le décor, la reconstitution d’un environnement propice, le son, le goût ou encore l’odorat. Les scénographes ont alors recours à des projections en très haute définition, des reconstitutions en 3D, des créations sonores ou olfactives62. Pour Roei Amit63 la technologie permet de nouvelles manières de présenter, mais l’innovation n’est jamais un but en soi, ce n’est qu’un moyen : « C’est toujours le contenu qui prime ». Son appropriation par le muséographe est donc fondamentale.

Cependant, si le but est de rendre plus attractif et accessible les lieux de mémoire « il est néanmoins nécessaire de ne pas confondre attractivité et attraction, au risque d’une ‘’disneylandisation’’ du site et de changer le sens de l’histoire »64. Par ailleurs, la question du tourisme noir se pose en terme d’éthique. Est-ce une nouvelle manière d’aborder l’histoire ou une tendance malsaine ?. Ce phénomène est défini par Malcom Foley et John Lennon comme le fait de voyager sur des lieux associés à la mort, à la souffrance et au macabre. Chez certains tour-opérateurs, à la recherche de sensationnel, le cynisme prend le pas sur l’histoire. Pour l’historien Frédéric Crahay, directeur de la Fondation Auschwitz : « Dans le tourisme mémoriel, l’aspect purement divertissant passe au second plan. Ce sont les dimensions historiques et mémorielles du lieu visité qui sont mises en avant »65 et la majorité des sites de commémoration cherchent effectivement à privilégier une vision pédagogique. Ce qui n’empêche pas certaines dérives.

De nombreux outils d’aide à la visite et de médiation sont mis en place en particulier l’offre numérique qui a investi depuis près de 30 ans les sites mémoriels, ouvrant une voie au «tourisme de mémoire 2.0 »66. Outre le fait qu’elle facilite la compréhension de l’histoire, cette utilisation des nouvelles technologies s’intègre aux pratiques quotidiennes des jeunes générations. Autre caractéristique de cette offre numérique, c’est son adaptation d’une part à la diversité des publics : anciens, parents, enfants, enseignants, simples curieux, habitués ou nouveaux visiteurs, et d’autre part à la pluralité des objectifs : commémorer, se souvenir, découvrir, se divertir, apprendre et s’instruire tout en vivant des expériences inédites. En effet, le visiteur, et plus particulièrement le jeune visiteur est en quête de sensations et d’émotions. Or le tourisme de mémoire fait appel à l’affect en puisant ses émotions dans un vécu expérientiel.

Le développement de dispositifs numériques innovants au sein des lieux de mémoire constitue désormais l’un des axes prioritaires de la politique de structuration du tourisme de mémoire. Cette évolution fait partie des enseignements que doivent intégrer les formations universitaires dédiées aux métiers de la culture et du tourisme.

C- Des exemples de muséographie renouvelée

La modernisation des muséographies est une tendance de fond qui semble être très prégnante dans la muséographie mémorielle . On en veut pour exemple le Centre Juno Beach qui propose de “vivre” le Débarquement depuis une barge où les visiteurs prennent place, pour être transportés au matin du 6 juin. Des images du Jour-J, des bataillons en action sont projetées aux murs, tandis que les voix de soldats rapportent leurs souvenirs. De même l’application “Ardennes, terre de mémoire”, développée par le Conseil Départemental des Ardennes, propose des circuits de découverte qui s’appuient sur des technologies de géolocalisation, de réalité virtuelle ou immersive. Le touriste choisit ses sites, reçoit les informations historiques grâce à des fiches descriptives. Il peut aussi « endosser les destins de vie de soldats ou de civils en lien avec les sites de mémoire et leur histoire, à travers des Role Play »67.

Le Mémorial du Mont-Faron propose quant à lui, un grand spectacle audiovisuel immersif sur les combats liés au débarquement en Provence qui permet de mieux comprendre les enjeux et les faits militaires qui contribuèrent à la libération de cette région. En effet, en plus de guider le touriste dans sa visite, ces dispositifs apportent des connaissances de manière ludique et favorisent l’apprentissage de l’histoire des conflits contemporains. le musée de la Résistance de Limoges avec l’application “Résistance en poche” destinée au jeune public (8-12 ans) est un exemple de cette nouvelle approche culturelle, mémorielle et pédagogique.

l’Historial de la Grande Guerre à Peronne présente des visites virtuelles afin de rendre le musée accessible à tous les publics où des scénographies tendent à faire vivre l’expérience de la Première Guerre mondiale en redonnant vie à des personnages. Cette approche offre une version plus ludique et abordable des faits historiques sans pourtant ne rien concéder aux exigences de rigueur scientifique, à l’instar du mémorial de Verdun qui vient de connaître une refonte totale de sa muséographie tout en restant fidèle à l’esprit de Maurice Genevoix. « Le nouveau Mémorial est conçu comme un centre d’interprétation qui fait parler, témoigner des objets, des documents d’archives à travers une expression scénographique immersive, ayant pour ambition de mettre les pas des visiteurs dans ceux des fantassins »68. Ainsi La nouvelle muséographie expose plus de 2 000 objets autour de 5 collections structurantes et mises en valeur par des techniques contemporaines avec des témoignages audio, la spatialisation du son, ou des supports graphiques. Le champ de bataille demeure au coeur de l’évocation. Il se découvre depuis les terrasses du musée où bornes multimédia et casques de réalité virtuelle racontent l’histoire du champ de batailles sous un angle inédit. « Grâce à une immersion à 360 degrés, les visiteurs se retrouvent au centre du paysage, tel qu’il était il y a maintenant plus de 100 ans, et suivent au fil des images l’évolution de ce même paysage témoin.

« Théâtraliser, surprendre […] c ‘est une manière de regarder au-delà de l’ordinaire, de sortir du vulgaire, du manstream afin de rendre au gens leur pouvoir d’imagination69». L’aménagement des lieux de mémoire n’échappe pas à cette modernisation Ils connaissent un développement spectaculaire depuis les années 1980, avec une accélération ces dernières années, en France comme en Europe.

Le développement des dispositifs immersifs, des expositions scénographiées, des approches ludiques et interprétatives sont autant de signes d’évolutions70. Au delà de ces nouveaux processus de conception, les évolutions muséales sont plus profondes, elles portent tout à la fois sur la place dédiée aux usagers et sur le sens dévolu à l’institution mais aussi sur le rôle des professionnels eux-mêmes. Les compétences nécessaires doivent être actualisées, et par conséquent les formations qui construisent ces métiers pour demain, repensées.

« Ce n’est pas un hasard si se développent par exemple les métiers de webmaster ou de community manager dans les institutions, c’est un rôle qui sera de plus en plus prédominant avec les digitals natives. Mais c’est aussi un rééquilibrage alors que le médiateur se métamorphose en animateur de mises en relation et propulseur d’actions, activateur de convergences, distillateur de créativités, interprétateur de subjectivités10.le musée est en train de vivre sa mue »71.

*******

1 plus de 1 000 dans Paris intra-muros https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-ile-de-france-0

2 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-ile-de-france-0

3 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-normandie

4 https://www.defense.gouv.fr/sga/nos-enjeux/memoire-culture-patrimoines/memoire

5 Le lieu de mémoire est un concept historique mis en avant par l’ouvrage les Lieux de Mémoire, paru sous la direction de Pierre Nora entre 1984 et 1992 Gallimard (Bibliothèque illustrée des histoires), Paris, 3 tomes : t. 1 La République (1 vol., 1984), t. 2 La Nation (3 vol., 1986), t. 3 Les France (3 vol., 1992)

6 « lieux de mémoire communs franco-québécois » sur le site de l’ association France6Quebec

7 Projet collectif M2 DPEC ACTT, le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme, webdocumentaire et exposition

8 Dossier « tourisme de mémoire » article de Claude Bouliou, juillet 2013

9 https://journals.openedition.org/viatourism/1276: La Gazette des communes de 1995

10 Ibid dans l’article « Verdun » des Lieux de mémoire (Prost, 1986) p1771

11 Ibid

12 Ibid

13 Ibid

14 Projet collectif M2 DPEC ACTT, le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme, webdocumentaire et exposition

15 https://ecolesuperieuretourisme.fr/blog/tout-savoir-sur-le-tourisme-memoriel/

16 la Lettre de l’OCIM Musées, Patrimoine et Culture scientifiques et techniques 150-2013

17 Frédéric Crahay, « Tourisme mémoriel », Témoigner. Entre histoire et mémoire

18.https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-alsace

19. ibid

20 https://journals.openedition.org/viatourism/485 , Cet article est une traduction de : Memoryscapes of the Great War

21 Ibid, tableau des valeurs attribuées aux sites

22 Répondant, Enquête WHTRN, 2012

23 EcoDef : bulletin de l’observation économique de la défense n°115 de 2018 et n° 160 de 2020

24 Ibid

25 https://memorha.hypotheses.org/files/2018/05/Pr%C3%A9sentation-M%C3%A9mospace.pdf

26 Rapport de Serge Barcellini – 2009

27 Entre école et musée, quels dispositifs ? Pour quels apprentissages ?

28 https://www.museedelagrandeguerre.com/enseignants-visite-sortie-scolaire/ateliers-pedagogiques/

29 Master2 DPEC/ACCTT 2020-2021

30 François Mairesse, « Claire Merleau-Ponty. Le Jeune Public au musée », Culture & Musées, 35 | 2020, p349-350

31 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-un-enjeu-national

32 le MMCC porte sur les conflits de 1870 à aujourd’hui

33 Ibid le-tourisme-de-memoire-un-enjeu-national

34 Bulletin écodef n° 160 de 2020

35 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-auvergne-rhone-alpes

36 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-de-memoire-en-auvergne-rhone-alpes

37 Bulletin écodef n° 160 de 2020

38 http://publictionnaire.huma-num.fr/notice/musees-de-guerre-et-musees-militaires/

39 Ibid

40 Fleuriel est une petite commune de l’ Allier, dans l’aire d’attraction de Saint-Pourçain-sur-Sioule

41 https://ecolesuperieuretourisme.fr/blog/tout-savoir-sur-le-tourisme-memoriel/

42 Http://publictionnaire.huma-num.f

43 https://ecolesuperieuretourisme.fr

44 Revue les chemins de la mémoire n° 279, p8

45 https://www.memorialcamprivesaltes.eu/decouvrir-le-memorial

46 tourisme lent, qui privilégie les formes d’itinérance douce pour découvrir un pays ou une région afin de limiter son impact environnemental

47 Ibid

48 Ibid

49 Une nouvelle stratégie de développement pour l’historial du paysan soldat. Master2 DPEC/ACCTT 2020-2021

50 ibid

51 Formations/fiches-metiers/culture/museographe-908

52https://www.cairn.info/revue-inflexions-2010-1-page-51.htm

53 Ibid

54 ttps://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-numerique-de-memoire

55 Ibid

56 Master2 DPEC/ACCTT 2020-2021

57 Ibid

58 Master2 DPEC/ACCTT 2020-2021

59 Projet collectif M2 DPEC ACTT, le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme, webdocumentaire et exposition p76

60 Le-tourisme-numerique-de-memoire

61 Projet collectif M2 DPEC ACTT, le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme, webdocumentaire et exposition p72

62 Master2 DPEC/ACCTT 2020-2021

63 Directeur général du Grand Palais Immersif

64 Projet collectif M2 DPEC ACTT, le tourisme mémoriel dans le Puy-de-Dôme, webdocumentaire et exposition p72

65 https://www.geo.fr/voyage/le-dark-tourism

66 https://www.cheminsdememoire.gouv.fr/fr/revue/le-tourisme-numerique-de-memoire

67 https://cd08.fr/articles/ardennes-terre-de-memoire-lappli-dhistoire-0

68 https://memorial-verdun.fr/

69 Christian lacroix, Lyrik n°1, juin-août 2022

70 Serge Chaumier, la Lettre de l’OCIM n° 150- 2013

71 Chaumier, S. et Mairesse, F. La Médiation culturelle. Armand Colin, 2013

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